« Face à face » animé entre Ruquier et Zemmour dans « On est en direct »
- Eric Zemmour était l’invité politique du deuxième numéro de la deuxième saison d’On est en direct sur France 2, dans la nuit de samedi à dimanche.
- Dans son livre, celui qui dit encore réfléchir à se présenter à la présidentielle, ne ménage pas Laurent Ruquier.
- « J’entends la même chose depuis de nombreuses années, c’est même la raison pour laquelle, au bout de cinq ans, j’en ai eu assez. J’ai mis un peu de temps à comprendre ce que vous disiez. Trop, peut-être », a notamment déclaré l’animateur.
Aux débuts de feu On n’est pas couché, entre 2006 et 2011,
Laurent Ruquier et
Eric Zemmour étaient côte à côte en tant qu’animateur et chroniqueur. Dans la nuit de samedi à dimanche, ils étaient face à face sur le plateau d’On est en direct.
Les rôles ont été redistribués et Léa Salamé, coprésentatrice depuis la rentrée, a d’emblée demandé à l’invité de préciser le sien : « On a qui devant nous, ce soir ? Un éditorialiste politique ? Un commentateur politique ? Un homme politique ? Un candidat à la présidentielle ? » L’objectif principal était de décrocher la primeur de son entrée officielle dans la course à l’Elysée. Le duo d’intervieweurs n’a pas lésiné sur les relances, Eric Zemmour a esquivé à chaque fois, se bornant à confirmer son «envie» de présenter sa candidature et sa volonté de « choisir son moment » pour annoncer sa décision.
La complicité d’antan n’aura donc pas été suffisante pour convaincre le polémiste de livrer un scoop au talk-show de France 2. Cependant, les liens, même fortement distendus, entre Laurent Ruquier et Eric Zemmour ont donné une dimension singulière à l’entretien qui a duré près d’une heure. En témoigne cet échange animé :
– Laurent Ruquier : Vous parlez de votre « triomphe médiatique à CNews ». Ça va les chevilles, Eric ? C’est un triomphe par rapport aux autres chaînes d’infos mais, par exemple, Nagui à la même heure, chaque soir sur France 2 fait trois fois plus d’audience que vous. Vous faites 5 %.
– Eric Zemmour : Quand je suis arrivé, la tranche horaire faisait 80.000 téléspectateurs, on est entre 800.000 et 1 million tous les soirs. Moi, j’appelle ça un triomphe. (…) C’est vrai que quand j’étais chez vous, on faisait beaucoup plus et que vous faites maintenant moins que moi.
(…)
– Ruquier : On fait en ce moment à peu près le même nombre de téléspectateurs. Sauf que vous, vous les faites à 19 h et nous, on les fait entre minuit et 2 h du matin. C’est incomparable. Ce qui compte, c’est la part de marché : combien de personnes sur cent qui regardent la télévision [à ce moment-là] vous regardent. Vous faites 5 %, on en fait deux ou trois fois plus. Il faut respecter la vérité des chiffres.
– Zemmour : Non ! Moi, je ne connais que les chiffres globaux, excusez-moi.
– Ruquier : J’espère que ce sera mieux et que monsieur Le Floch Prigent, ex-condamné, vous conseillera mieux pour l’économie.
– Zemmour : Le Floch Prigent a dirigé des entreprises que vous ne pourrez jamais diriger.
– Ruquier : Non mais moi, en tout cas, je ne suis jamais allé en prison.
« Vous me connaissez depuis quinze ans, j’ai l’impression que je suis toujours le même. Je dis toujours la même chose, ce qui désespère parfois certains », avait un peu plus tôt répondu Eric Zemmour à la première question de Léa Salamé. « Ça, c’est vrai, a réagi l’animateur. J’entends la même chose depuis de nombreuses années, c’est même la raison pour laquelle, au bout de cinq ans, j’en ai eu assez. J’ai mis un peu de temps à comprendre ce que vous disiez. Trop, peut-être. »
Ces remords n’ont rien de nouveau. En 2015, Laurent Ruquier – d’ailleurs interrogé sur le sujet par Léa Salamé – faisait son mea culpa pour avoir recruté Eric Zemmour comme chroniqueur : « Je le regrette, car je me rends compte que j’ai participé à la banalisation de ces idées-là. »
« Pourquoi j’aurais des militants gays autour de moi ? »
Si l’entretien de cette nuit sort du cadre traditionnel de l’interview politique dont on a l’habitude à la télévision française, c’est parce que l’animateur n’est pas été ménagé par son ancien collaborateur. Il a pu le confronter et lui répondre.
Dans le livre autoédité et dont il assure la promotion, La France n’a pas dit son dernier mot, Eric Zemmour parle d’On n’est pas couché. Il y qualifie Laurent Ruquier et son ancienne productrice Catherine Barma de « Thénardier » et raconte pourquoi, selon lui, il a fini par être écarté du talk-show. « Les raisons pour lesquelles je me suis séparé de vous, ce n’est pas du tout ce que vous écrivez », a corrigé l’animateur, citant un extrait : « Il rongeait son frein depuis des mois. Sa table est assaillie chaque soir par une cour de bobos de gauche et de militants gays, tout ce petit milieu parisien scandalisé de longue date par mes provocations. » Cette affirmation a ulcéré le principal concerné : « Mais comment vous savez qui j’invite à ma table le soir ? Et pourquoi j’aurais des militants gays autour de moi ? »
« Quand on vous écoute, on a envie d’être un peu plus militant »
Réponse évasive d’Eric Zemmour : « Des gens parlent beaucoup dans Paris, vous savez. » « Je ne sais pas qui vous dit ça, mais ça prouve que vous ne lisez pas la plupart des rapports des associations gays qui m’en veulent de ne pas être assez militant ou « communautariste », comme vous n’aimez pas qu’on le soit. C’est vrai que quand on vous écoute, on a envie de l’être un peu plus, ça c’est vrai », a enchaîné Laurent Ruquier, faisant sans doute référence au rapport de l’AJL* – association dont est membre l’auteur de cet article – sur Les Grosses Têtes.
Dans son livre, Eric Zemmour relate également sa venue dans On n’est pas couché à l’automne 2014 où il fut pris à partie par Xavier Dolan et l’actrice Anne Dorval, alors en pleine promo de Mommy. « Je vous jure Eric, cela me déçoit beaucoup de lire des choses comme ça, a confié Laurent Ruquier avant de lire l’extrait en question : « Elle était accompagnée de son metteur en scène, un jeune éphèbe au regard tourmenté qui, si j’en croyais le portrait élogieux qu’en fit Ruquier, avait du génie du seul fait qu’il était gay. » C’est-à-dire que j’inviterais un réalisateur sur ce plateau du seul fait qu’il soit gay ! ? », s’est étouffé l’animateur.
« Ce n’est pas ce que j’écris, vous me comprenez mal », a glissé l’ancien chroniqueur. « Si, c’est ce qui est écrit », a insisté le présentateur avant que Léa Salamé intervienne : « C’est un excellent réalisateur ! On s’en fout qu’il soit homo ou pas. » « On ne s’en fout pas parce qu’on ne parle que de ça. Vous ne vous rendez même pas compte à quel point vous êtes le véhicule de l’idéologie dominante », a répliqué Eric Zemmour – qui se fera mentir un peu plus tard en affirmant : « Si vous voyiez les sondages, c’est vous qui êtes marginal. 70 % des Français pensent comme moi ».
« En lisant votre livre, on comprend qui vit dans une bulle »
Pour lui, les émissions de Laurent Ruquier « sont éminemment politiques. En permanence, il y a la promotion des minorités, du politiquement correct, de toute cette idéologie, vous la véhiculez. » « Vous n’avez jamais regardé le réel en face depuis que je vous connais », déclarera-t-il à son ancien employeur vers la fin de l’interview. « C’est toujours votre réponse : « On vit dans un petit milieu, dans une bulle. » Quand on lit votre livre, on comprend qui vit dans une bulle et dans un petit milieu, croyez-moi », a répliqué l’animateur d’On est en direct.
« Nous allons faire réagir Eric Zemmour sur toutes les affiches électorales qui fleurissent dans Paris, annonçait Laurent Ruquier la semaine dernière dans les colonnes du Parisien. C’est quand même amusant de voir cela, surtout quand je pense qu’il y a dix ans, ce gars-là était sur mon plateau. J’ai l’impression que c’est un gag. » Cette nuit dans le talk-show de France 2, les rires étaient surtout crispés.
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