Asia Argento : « J'ai payé le prix d’être sans doute trop impulsive »
- Asia Argento est la première femme présidente du jury au Festival du Film Fantasitque de Gérardmer.
- Cette figure de proue du mouvement #MeToo confie à 20 Minutes avoir « retrouvé la paix ».
- L’été prochain, l’artiste italienne tournera dans un giallo dirigé par son père, Dario Argento.
On ne peut qu’admirer Asia Argento , figure de proue du mouvement #MeToo qui osa témoigner contre
Harvey Weinstein. Aujourd’hui, l’actrice, réalisatrice et musicienne se dit « apaisée » après des mois de tourmente, prête à devenir la première femme présidente du jury du
Festival de Gérardmer qui se déroule du 29 janvier au 2 février.
La fille du maître l’horreur italienne Dario Argento et de la comédienne et scénariste
Daria Nicolodi est tombée dans la marmite du cinéma fantastique quand elle était petite. C’est depuis Rome, juste avant de s’envoler pour les Vosges, qu’elle s’est confiée à 20 Minutes. Elle sait que Gérardmer ne se prononce pas « Gérardmère » et ne cédera pas au port des moon boots pour arpenter la station. « Un peu de classe quand même ! », nous lance-t-elle dans un français qu’elle maîtrise parfaitement.
Cette présidence du jury signifie quoi pour vous ?
J’ai reçu l’invitation alors que j’étais alitée après m’être cassé le genou en trois morceaux. J’ai passé cinquante jours immobilisée et c’était un cadeau qui m’a aidée me remettre. Je crois que mon corps a voulu me faire savoir qu’il était temps de me reposer…
Dans quel état d’esprit êtes-vous aujourd’hui ?
Je viens de finir d’écrire mon nouvel album qui sortira en mars. C’est la première fois que j’écris tout moi-même. J’y parle de choses intimes en variant les genres musicaux, en chantant en anglais et en romain, ce qui me fait du bien. C’est l’une de mes œuvres les plus personnelles, ne serait-ce que parce que je m’exprime dans ma langue natale…
Et depuis l’affaire Weinstein ?
J’ai vécu des moments très difficiles. Je commence seulement à retrouver la paix, à être en phase avec moi-même. J’avais besoin de parler. Je me sens mieux. J’avais déjà essayé d’évoquer mes traumatismes dans Scarlet Diva en 2001. Cette autobiographie réalisée en numérique n’avait pas suffi. Il a fallu que ça sorte !
Regrettez-vous votre prise de parole ?
Honnêtement, je ne m’attendais pas à une telle tempête. J’ai beaucoup souffert. Ma mère me dit depuis l’enfance de toujours réfléchir dix secondes avant de prendre la parole. J’en suis incapable et j’ai payé le prix d’être sans doute trop impulsive. Quand on est la première à ouvrir la porte, on la prend souvent dans la figure avant que les autres s’engouffrent dans la brèche.
N’êtes-vous pas fière de vous ?
Je suis fière de toutes les femmes qui ont osé parler et pas seulement dans le milieu du cinéma. Il était plus que temps de déclarer la guerre au patriarcat. Même s’il revient en force aux Etats-Unis avec les reculées sur l’avortement. Il faut continuer à se battre. Rien n’est jamais acquis. J’espère maintenant qu’Harvey Weinstein finira sa vie en prison.
Vous battrez-vous aussi pour faire triompher vos choix dans le jury de Gérardmer ?
Dans ce domaine, je ne suis pas agressive. J’ai bien observé Isabelle Huppert quand elle était présidente à Cannes et que je faisais partie du jury. Comme elle, j’écouterai et je partagerai. J’ai acheté des carnets pour tous les membres du jury afin qu’ils puissent prendre des notes. Je suis vieux jeu pour ça : je crois qu’il faut prendre des notes pour bien argumenter au moment des débats.
On accuse le cinéma fantastique d’être sexiste, le pensez-vous aussi ?
Le cinéma en général est sexiste ! Pour le fantastique, je sais que mon père dit que les femmes sont plus belles que les hommes quand elles expriment la peur au cinéma. Des réalisatrices finiront peut-être par prouver qu’il se trompe. Il n’y en a pas encore assez mais ça viendra.
Pouvez-vous avoir encore peur au cinéma ?
J’ai toujours aussi peur quand je vois certains films de mon père comme Les Frissons de l’angoisse. Même si je connais le film par cœur. La dernière œuvre qui m’a traumatisée est Climax de Gaspar Noé. J’ai hurlé ! J’étais tellement flippée que l’assistant de Gaspar qui avait organisé la projection ne savait pas comment me calmer. J’aime ces expériences de cinéma qui vous immergent totalement au point de vous faire oublier qu’il s’agit d’une fiction.
Reviendrez-vous personnellement au fantastique ?
Pas plus tard que cet été quand je vais tourner Lunettes noires avec mon père. C’est un scénario de giallo qu’il a écrit il y a des années et que j’ai retrouvé. Nous l’avons modernisé et je peux vous garantir que le film sera terrifiant. Mon père s’y connaît dans ce domaine. On peut lui faire confiance pour terroriser le public.
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