Les femmes et le pantalon, histoire d’une émancipation tumultueuse

C’est un fait divers politique qui avait, à l’époque fort amusé, l’entre-soi médiatique. Nous sommes le 31 janvier 2013 et le Ministère des Droits des femmes, annonce que l’ordonnance du 16 brumaire an IX* interdisant – aux femmes de s’habiller en hommes – est implicitement abrogée.

Stupeur générale dans l’opinion publique : de quoi est-on sérieusement en train de parler ? Sommes-nous tombés dans une faille spatio-temporelle sans que personne n’ait daigné nous tenir au courant ?

Car peu le savent alors, le port du pantalon a été – et le sera officiellement jusqu’à cette décision ministérielle – interdit aux femmes, et plus particulièrement aux Parisiennes du fait de cette disposition légale interdisant au sexe alors réputé faible de s’approprier des vêtements que la coutume attribue alors au sexe fort.

« Toute femme désirant s’habiller en homme doit se présenter à la préfecture de police pour en obtenir l’autorisation et que celle-ci ne peut être donnée qu’au vu d’un certificat d’un officier de santé » détaille alors la sidérante ordonnance.

Si le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin avait déjà décrété que son caractère désuet suffisait à l’ invalider, elle n’en reste pas moins un symbole remarquable du rôle primordial joué par ce vêtement dans l’évolution des rapports de domination hommes-femmes et, par extension, dans la lutte pour l’émancipation de ces dernières.

Le pantalon, un vêtement interdit aux femmes

Interdit aux femmes, réservé aux hommes : tel fut en substance le sort assigné aux descendants des pantaloni, ces culottes longues et étroites fétichisées par les Vénitiens et leur culte de Saint Pantaleone mais aussi plébiscités par les marins et pêcheurs dès le XVIe siècle.

Et pour cause, à l’aune de la Révolution Française et de ses grands principes d’abolition des privilèges, les porte-étendards de la fameuse « liberté-égalité-fraternité » n’en restaient pas moins des boomers soucieux de préserver un système patriarcal fondé sur une domination masculine à peine voilée.

« Qui culotte a, pouvoir a », disait-on alors, comme le rappelle Christine Bard dans son éloquente Une Histoire Politique du Pantalon (Seuil, 2010).

Le pantalon n’est pas simplement « pratique »[…]. Il symbolise le masculin ainsi que les pouvoirs et les libertés dont jouissent les hommes. – Christine Bard

Peu étonnant donc que ceux-là même qui envoyèrent Olympe de Gouges à la guillotine décidèrent la même année de priver les femmes de ce sésame vestimentaire aussitôt l’ordre républicain proclamé.

C’est ainsi que l’interdiction de se travestir de l’Ancien Régime, héritée elle-même de la Bible*, sera reprise par une loi du 29 octobre 1793, qui assoit la liberté du costume, mais dans le respect de la différence des sexes.

Résultat ? Les femmes sont exclues du scope genré du pantalon, et accessoirement de toute forme d’activité requérant confort et flexibilité pouvant au demeurant leur conférer pouvoir et indépendance.

Seule exception ? Le pantalon court en soie ou coton léger qui, telle une pièce de lingerie délicate, se porte sous les opulents jupons ou les robes semi-transparentes « à la grecque », en vogue plus tard durant le Directoire.

Le succès d’une pièce confortable

Pourtant dès le milieu du 19e siècle, une poignée d’esprits effrontés se révoltent contre cette prohibition injustifiée.

Tandis que la feministe Marie Rose Astié de Valsayre et la médecin Madeleine Pelletier tente une à une de faire abroger en 1887 la fameuse ordonnance du 7 novembre 1800 face aux députés, des intellectuelles et artistes comme George Sand, Colette et Rosa Bonheur n’hésitent pas à se travestir et adopter le pantalon de tous les litiges, qui restent toutefois autorisé pour raison professionnelle, comme l’exercice d’un métier masculin.

Encore faut-il, en tant que femme, pouvoir accéder à ce dernier. Parmi les happy fews de l’époque, l’archéologue Jane Dieulafoy, qui ne quittera pas son uniforme de travail de retour de fouilles et le conservera pour recevoir la Légion d’Honneur en 1886.

Un choix qu’elle justifie alors par des raisons de confort et de praticité, tout comme l’ensemble des frondeuses adeptes de ce costume aux velléités égalitaires.

« Rien n’est moins naturel que de s’habiller en femme ; sans doute le vêtement masculin est-il artifice lui aussi, mais il est plus commode et plus simple, il est fait pour favoriser l’action au lieu de l’entraver; George Sand, Isabelle Eberhardt portaient des costumes d’hommes. » soulignera en 1949 Simone de Beauvoir dans le Deuxième Sexe.

Le pantalon, une histoire de femme

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