La Fashion Week de New York est-elle en danger ?
À peine commencée, la Fashion Week de New York est déjà dans la tourmente. Prévue du 7 au 11 février, elle est pourtant désertée par de plus en plus de créateurs, qui décident de faire défiler leurs collections automne-hiver 2020-2021 dans d’autres villes. Explications.
En janvier 2019, le Council of Fashion Designers of America (CFDA), chargé de promouvoir les professionnels de la mode aux Etats-Unis, nommait le designer Tom Ford à sa tête. Il prenait donc la place de Diane von Furstenberg, qui occupait le poste depuis treize ans. Pour beaucoup, cette nomination permettait de donner un nouveau souffle au CFDA et à la Fashion Week de New York, cette dernière étant considérée comme en perte de vitesse face à celles de Milan, Paris et Londres, néanmoins également ralenties depuis quelques saisons. En mai 2019, le créateur annonçait raccourcir la semaine de la mode américaine à cinq jours au lieu d’une semaine. Une décision saluée par de nombreux professionnels, qui voyait en elle un nouveau départ pour la Fashion Week de New York, après une succession de saisons peu concluantes.
Des défilés de moins en moins nombreux
Huit mois après la prise de décision de Tom Ford et au premier jour de la présentation des collections automne-hiver 2020-2021, la Fashion Week de New York ne semble pourtant pas se porter mieux. Rihanna, dont le défilé Savage x Fenty avait été largement salué par la critique en septembre dernier, n’organisera cette fois-ci pas de défilé dans la « Big Apple ». De même pour Ralph Lauren, Pyer Moss et Alexander Wang, qui ont choisi de ne pas défiler cette saison. Tommy Hilfiger, pourtant un habitué de la semaine de la mode new-yorkaise, présentera quant à lui sa nouvelle collection à Londres. De son côté, l’excentrique Jeremy Scott, qui devait ouvrir la Fashion Week ce vendredi 7 février à 20 heures, défilera finalement à Paris en juillet prochain, lors de la semaine de la Haute Couture. Le designer rendait cependant un hommage vibrant au style new-yorkais lors du dernier défilé de son label éponyme.
Tom Ford, pourtant président du CFDA, a lui aussi décidé de défiler en dehors de la Grosse Pomme, s’envolant à la place pour Los Angeles. « Quelqu’un m’a demandé, l’autre jour, comment je pouvais justifier le fait de défiler à Los Angeles dans la mesure où je suis aujourd’hui le président du CFDA, explique le créateur dans les pages de Business of Fashion. Je lui ai rappelé qu’il s’agit du Council of Fashion Designers of America et pas le Council of Fashion Designers of New York ».
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Le final du défilé Tommy Hilfiger automne-hiver 2019-2020, à New York ©Jonas Gustavsson/SPUS/ABACAPRESS.COM
Fashion Week de New York : une organisation complexe
Autre problématique, l’organisation même de la Fashion Week new-yorkaise. Si la majorité des défilés sont inscrits au calendrier officiel du CFDA, l’événement est concurrencé par NYFW The Shows, soutenu par IMG, qui attire de plus en plus de créateurs. C’est notamment le cas de Christian Siriano, qui a présenté sa nouvelle collection ce jeudi 6 février aux Spring Studios, où ont lieu la plupart des défilés encadrés par NYFW The Shows. D’autres prennent place à Los Angeles, comme celui de M Missoni, qui a lancé l’événement ce mardi 4 février. Une Fashion Week encadrée par deux organisations distinctes qui ne fait qu’accentuer la confusion qui règne autour de l’événement.
Face à tant de changements, il est légitime de s’interroger quant à l’avenir de la Fashion Week de New York. Mais si les grands noms de la mode américaine semblent nombreux à déserter la Big Apple cette saison, beaucoup de créateurs incontournables restent fidèles à l’événement. Parmi eux, Gabriela Hearst, Carolina Herrera, Marc Jacobs, Tory Burch ou encore Oscar de la Renta. Quelques marques feront également leur retour au calendrier officiel, dont le label Monse, lancé par Laura Kim et Fernando Garcia, les designers d’Oscar de la Renta, Rag & Bone et Rodarte. Pour remplir son calendrier, la semaine de la mode accueillera également de nouveaux talents comme Sukeina par Omar Salam, Private Policy ou encore e1972, marque lancée par Elite World Group, société-mère d’Elite Model Mangement.
Une Fashion Week ancrée dans son époque
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Silhouette du défilé Prabal Gurung printemps-été 2020 ©Imaxtree
Malgré les problématiques auxquelles elle fait face, la Fashion Week de New York continue de se démarquer de ses consœurs grâce à l’engagement prononcé de ses créateurs. Ces derniers n’hésitent pas à utiliser leurs défilés pour s’emparer des questions de société contemporaines, s’érigeant tour à tour comme des défenseurs des droits des immigrés ou du droit à l’avortement, des problématiques soulevées face aux différentes mesures restrictives mises en place par le gouvernement du président Donald Trump. C’était notamment le cas en septembre dernier avec le défilé du créateur Prabal Gurung, qui ne s’était pas privé d’une pique contre l’administration Trump avec ses mannequins vêtus d’une écharpe griffée d’un insolent « Who gets to be American ? » (Qui a le droit d’être Américain ?), à la ressemblante troublante avec celles du concours Miss Univers (dont l’ex-propriétaire n’est autre que Donald Trump). On se souvient aussi du défilé Pyer Moss (qui ne défilera pas cette saison), qui livrait un véritable hommage à la culture afro-américaine avec un casting 100% noir et soixante choristes sur le podium pour accompagner les mannequins. On a déjà hâte de découvrir ce que la Fashion Week new-yorkaise nous réserve cette saison.
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