Dans "Karl et moi", Baptiste Giabiconi nous donne à voir un autre Karl Lagerfeld
Sorti ce 27 février aux éditions Robert Laffont, le livre "Karl et moi" écrit par le mannequin et héritier de Karl Lagerfeld, Baptiste Giabiconi, dévoile la relation privilégiée du mannequin et du célèbre designer décédé le 19 février 2019.
C’est un nom qui a marqué son époque. Karl Lagerfeld a beau avoir disparu le 19 février 2019, a touché tout le monde, en France comme à l’international, il reste le designer le plus connu au monde. Un homme que rien ne semblait pouvoir arrêter. Un mythe presque.
J’ai aimé Karl, Karl m’a aimé. Je l’aime toujours. […] Parce que moi, je crois au ciel. La preuve, un jour, dans la rue, j’ai rencontré Karl Lagerfeld
Un mythe approché de près par Baptiste Giabiconi qui raconte, dans une écriture sans fioritures son Karl Lagerfeld. Dans Karl et moi, son premier ouvrage paru ce 27 février aux éditions Robert Laffont, le mannequin originaire de Marseille raconte sa relation, nimbée de mystère, sujette à toutes les rumeurs, avec Karl Lagerfeld. « J’ai aimé Karl, Karl m’a aimé. Je l’aime toujours. […] Parce que moi, je crois au ciel. La preuve, un jour, dans la rue, j’ai rencontré Karl Lagerfeld« , raconte-t-il dans sa préface.
2008, la rencontre
« Baptiste, c’est Delphine ! Il y a M. Lagerfeld qui voudrait te voir ». Comme dans beaucoup d’histoires, la rencontre entre Baptiste Giabiconi alors jeune marseillais de 18 ans qui vient à peine de se lancer dans la mode, commence par un coup de téléphone. On est friand de ce genre d’histoires, cet appel qui change la vie telle qu’on la connaissait jusqu’alors.
Nous sommes en 2008, et c’est un shooting non rémunéré pour le magazine italien Slurp qui fait que Karl Lagerfeld pose les yeux sur celui qui deviendra son fils spirituel. En octobre de la même année, Giabiconi défile pour la première fois pour Chanel.
Tant que cette grâce durerait, j’aurais ma place dans ce monde et je serais bien dans mon cœur
Très vite, le jeune mannequin semble être indispensable au bien-être de Karl Lagerfeld. Leur relation, fusionnelle, s’attire tôt les railleries, mêlées de mépris social, telle cette tirade d’un journaliste du magazine Les Inrockuptibles qui écrit à son propos que son « côté bling-bling emprunté au directeur artistique de Chanel comme beaucoup de ses fringues, qu’il n’hésite pas à mixer avec son style tout personnel de cagole au masculin probablement hérité de son enfance marseillaise ».
« Baptiste, c’est à toi d’être sûr de toi », dit-alors le célèbre designer au mannequin qui lui demande son approbation quant à une telle tenue à ses côtés.
L’amour selon Karl Lagerfeld
C’est parce qu’il n’a jamais rien fait ou dit comme les autres que Karl Lagerfeld a toujours conservé une aura si charismatique. Et si on chuchote encore sur sa relation épineuse avec Yves Saint Laurent et Pierre Bergé et son amour passionné pour Jacques de Bascher, la question d’une quelconque liaison entre Karl Lagerfeld et Baptiste Giabiconi est rapidement évacuée. « Nous ne nous sommes jamais touchés autrement que comme un père et un fils », écrit Giabiconi. Et d’ajouter : « En gros, passer pour gay, ne pas être gay, ou peut-être bien que si, on s’en fout. […] I am what I am. »
Il n’empêche que l’amour de Lagerfeld a quelque chose d’exclusif. S’il était passionné par son travail, il aimait aussi s’entourer de la même troupe que ce soit au 7L, la librairie qui abritait également son studio photo ou lors de ses vacances. « J’entends dire parfois qu’il achetait les gens, que sa générosité avait quelque chose d’asphyxiant, c’est vrai à ceci près que le lien avec lui dépassait toujours l’intérêt ou l’emprise », écrit celui qui a fêté son 30ème anniversaire en novembre dernier.
Le livre est d’ailleurs un condensé de passages relatant des séances de shoppings, des festivités exubérantes et le compte des cadeaux adressés aux amis qu’il aime vraiment. À la lumière de ce récit, il apparait que chez Lagerfeld, l’argent ne semble pas être une manière de dominer, mais simplement une manière de faciliter sa vie et celle de ceux qui l’entourent. « Aucun journaliste, aucun biographe ne semble avoir remarqué à quel point il a fixé autour de lui, dans sa dernière décennie, une tribu, une famille où chacun tenait sa place, officielle ou informelle, mais reconnue », lit-on encore.
Karl Lagerfeld, homme pudique
S’il y a finalement quelque chose de surprenant dans cet ouvrage, c’est sans aucun doute la familiarité. Un mot que l’imaginaire collectif accolera sans doute difficilement au nom de Karl Lagerfeld, tant on a vu de lui le personnage plus que l’homme. Quelle étonnement d’apprendre que Giabiconi a ainsi un jour chanté Les Sardines de Patrick Sébastien pour faire rire Karl Lagerfeld lors d’un shooting Chanel. « Ça le changeait des poètes romantiques allemands. »
Il y a également ce moment où le mannequin participe à Danse avec les stars, en décembre 2011. « Il a regardé l’émission, mordu, prêt à faire voter tout Chanel et tout Paris. À 20h50 pétantes, il a envoyé bouler son monde pour filer chez lui mater Danse avec les stars devant un plateau-repas. Karl, l’homme qui te surprendra toujours », note l’auteur.
Des anecdotes comme celles-ci, Karl et moi en est rempli. À la fois touchantes et surréalistes, elles nous donnent à percevoir, avec un plaisir certain, l’homme derrière les lunettes noires et le catogan.
N’attendez cependant pas d’en apprendre plus sur les derniers instants de Karl Lagerfeld. Le créateur, pudique, a aussi dissimulé à ce fils spirituel, qu’il a voulu adopter, l’ampleur qu’avait pris sa maladie. « Pardon Seigneur. Karl m’appelait mon ange et je me suis vu pousser des ailes. Parce que je suis un jeune con mégalo et arrogant. Et parce que je croyais toujours Karl immortel. Je me trompais. » Nous aussi.
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