Violences conjugales : l'État condamné pour ne pas avoir protégé une femme brûlée par son ex-conjoint

« Faute lourde » et « inaptitude » à protéger une femme victime de violences conjugales. Ce sont les chefs d’accusation pour lesquels l’État français a été reconnu coupable le 16 novembre 2022.

Selon une décision du tribunal judiciaire de Paris, révélée par Le Monde le 25 novembre 2022 et confirmée par l’AFP trois jours plus tard, la France a été condamnée à verser 10 000 euros de dommages et intérêts, mais aussi 3 000 euros pour ses frais de justice et 3 000 supplémentaires pour le préjudice moral de chacun de ses deux enfants, à une survivante de violences conjugales agressée violemment par son ex-conjoint.

La justice a ainsi estimé que l’État ne l’a pas assez protégée. D’autant que son ancien conjoint, Karim B., avait déjà été condamné pour violences conjugales et la menaçait, ainsi que leurs enfants, depuis plusieurs mois. Celle-ci a été aspergée d’acide sulfurique par son ex-compagnon et père de ses deux enfants le 12 juin 2018 près du Stade-Vélodrome de Marseille. 

D’après les déclarations du tribunal judiciaire de Paris cette histoire représente « l’inaptitude du service public de la justice » à sécuriser la vie de la femme victime de violences conjugales.

Des violences répétées et alertées par la victime

Quelques semaines avant de passer à l’acte, l’homme évoquait déjà sa volonté d’attaquer le visage de son ex-compagne. Le Monde décrit ses menaces : « Il veut la défigurer, cela fait des semaines qu’il parle de la brûler, d’empêcher qu’un autre homme lève les yeux sur elle. »

Karim B. avait alors été condamné à « dix-huit mois de prison avec sursis assortis d’une mise à l’épreuve et une interdiction de paraître aux abords du domicile de son ex-compagne ».

Au mois de mars 2018, un téléphone grave danger avait même été attribué à la victime. Un juge d’instruction avait également été saisi pour de nouvelles violences avec couteau, énumère le quotidien. Jusqu’à juin de la même année « Cathy [prénom modifié, ndlr] va déposer sept plaintes pour des violences, des menaces de mort, la diffusion d’images intimes sur les réseaux sociaux, le placement d’une balise de géolocalisation sous son véhicule… ».

Quelques jours avant le drame, l’homme placé sous contrôle judiciaire s’était rendu au domicile de son ex-compagne. Placé en garde à vue le 6 juin 2022, il a été remis en liberté le 8 juin alors que, selon l’AFP, un mandat d’arrêt avait été émis contre lui.

Si Karim B. a été condamné à 18 ans de prison en 2018, sa peine a été réduite à 15 ans par la cour d’appel d’Aix-en-Provence en juin 2020.

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L’État déjà condamné pour « faute lourde » dans un féminicide 

Ce n’est pas la première fois que l’État est condamné pour ne pas avoir su protéger des femmes victimes de violences conjugales. Le tribunal judiciaire de Paris avait déjà reconnu l’État coupable de « faute lourde » en 2014 après dans une affaire de féminicide, celle de la mort d’Isabelle Thomas et de ses deux parents, assassinés par son ex-conjoint. Le meurtrier était placé sous contrôle judiciaire et avait l’interdiction d’approcher la défunte lorsqu’il est passé à l’acte.

Le collectif féministe Noustoutes comptabilise 124 féminicides depuis le début de l’année 2022.

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