Salvador : une jeune femme condamnée à 50 ans de prison pour avoir fait une fausse couche

Peine maximale. Mercredi 29 juin 2022, une jeune Salvadorienne a été condamnée par le tribunal de San Miguel, dans l’Est du pays, à 50 ans de prison. Son crime ? Avoir été victime d’une urgence obstétrique. Avoir accouché d’une fillette qui n’a survécu que quelques heures. Un homicide avec circonstances aggravantes pour la justice du pays.

Selon le Collectif citoyen pour la dépénalisation de l’avortement (Acdatee) qui révèle l’affaire ce lundi 4 juillet 2022, Lesly, âgée de 19 ans aux moments des faits en juin 2020, a accouché sans s’en rendre compte dans les latrines de sa maison, avant d’être admise en urgence à l’hôpital.

« Elle ne savait même pas qu’elle était enceinte, c’était sa première grossesse, et c’était en réalité le travail qui commençait », détaille au Monde l’avocate de ce collectif, qui va faire appel du jugement.

Le défunt bébé est né vivant après 37 à 40 semaines de gestation, selon le parquet cité par l’Agence France-Presse (AFP) relayée Ouest France.

Incarcérée après son hospitalisation

Tout de suite après son hospitalisation, Lesly a été incarcérée et mise en examen pour « homicide aggravé ». Le parquet estime qu’elle aurait caché sa grossesse à sa famille et aurait tué le bébé, avec un couteau, avant de « l’abandonner dans la cour de la maison ».

Le parquet ne cherche pas à trouver la vérité, mais à condamner les femmes.

Issue d’un village rural et d’une foyer très pauvre, où elle vit avec ses six frères et sœurs sans accès à l’eau potable ni à l’électricité, la jeune femme est « victime de violences de genre de la part de sa famille depuis qu’elle est enfant », affirme l’avocate auprès du quotidien français. Ce que le parquet a refusé de prendre en compte. « Il a aussi refusé qu’une expertise psychologique soit pratiquée. Le parquet ne cherche pas à trouver la vérité, mais à condamner les femmes », dénonce-t-elle.

Des femmes jugées pour homicide aggravé

Le Salvador demeure l’un des derniers pays au monde à interdire l’avortement, en toutes circonstances. Donc même si la grossesse abrite un danger pour la santé de la femme enceinte ou du bébé. C’est inscrit dans son code pénal depuis 1998, qui prévoit pour les Salvadoriennes qui avortent des peines allant de deux à huit ans d’emprisonnement.

Dans ce pays d’Amérique latine, les femmes qui font une fausse couche sont accusées d’avoir voulu avorter. Et le jugement pour avortement se mue en une affaire d’homicide aggravé pour celles qui ont accouché d’un bébé mort-né. Et dans ce pays dans lequel l’Église catholique préserve un important pouvoir, elles risquent alors 30 à 50 ans de prison.

Pour la première fois, la peine maximale a été prononcée avec cette insupportable condamnation, dénonce l’Acdatee.

D’après le Collectif féministe pour le développement local, relayé par Le Monde début mai 2022plus de 180 femmes ayant fait une fausse couche ont été condamnées à des peines de prison au Salvador en 20 ans. Une dizaine de ces femmes sont encore en détention. 

Deux mois avant Lesly, le 9 mai dernier, une Salvadorienne – dont l’anonymat a été préservé – a été condamnée à 30 ans de prison, pour voir fait une fausse couche. À l’hôpital, la femme qui venait de perdre son fœtus a été dénoncée à la police.

Après la prononciation de telles peines, certaines femmes parviennent à fuir leur pays et obtiennent l’asile.

  • Aux États-Unis, de fausses cliniques d’avortement traumatisent des patientes
  • Sharon Stone révèle avoir « perdu neuf enfants par fausse couche »

Source: Lire L’Article Complet