OMC, Trésor américain… Ces femmes tiennent les rênes de l'économie

De la nomination de Ngozi Okonjo-Iweala à la tête de l’OMC à celle de Janet Yellen au secrétariat du Trésor américain, les femmes prendraient-elles les rênes des finances ? Réponse avec l’économiste Cécile Aubert*.

ELLE. Ces nominations marquent-elles un tournant dans l’histoire ?

CÉCILE AUBERT. Historiquement, c’est en effet assez inédit, même si le FMI était en avance en nommant une femme [Christine Lagarde, ndlr] à la gestion des crises. Contrairement aux entreprises, dans ce type d’organisations, la performance est difficile à mesurer et les objectifs sont multifactoriels, on peut être plus frileux dans les nominations et, comme en politique, les préjugés envers les femmes sont encore très tenaces : elles n’auraient pas les compétences, les épaules, ou seraient trop émotives. Il faut aussi nommer quelqu’un qui fasse consensus auprès des gouvernements avec lesquels l’organisation va traiter, y compris ceux qui sont réticents à traiter avec une femme.       

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ELLE. Les femmes ont-elles une gestion différente de celle des hommes ?                

C.A. Des études ont montré que les femmes ont plus d’aversion pour le risque que les hommes, on peut donc s’attendre à ce qu’elles aient des conduites plus prudentes. Cette aversion augmente aussi avec l’âge. Mais les femmes qui arrivent à ce niveau de compétences ont dû surmonter plus d’obstacles que le plafond de verre et ont toutes des personnalités hors norme, difficile donc de généraliser. Durant le Covid, les pays où les femmes étaient au pouvoir ont mieux géré le risque avec des précautions plus rapides et des décisions plus prudentes.                

ELLE. Que nous a appris l’exemple de Christine Lagarde ?                

C.A. D’abord, qu’une femme pouvait être parfaitement compétente, elle a normalisé l’image des femmes au plus haut niveau, cela a ouvert la voie à d’autres. Aujourd’hui à la tête de la BCE, elle a incarné la rigueur du FMI, on a d’ailleurs souvent dit que sa gestion n’était pas « féminine ». C’est le biais pour ce type de postes : les femmes qui parviennent à ce niveau-là y sont arrivées parmi des hommes et sont sélectionnées par des hommes, on peut donc supposer qu’elles ont des caractéristiques proches de celles qu’on attend d’un dirigeant.       

* Professeure d’économie à l’Université de Bordeaux, chercheuse à la Toulouse School of Economics et au Laboratoire d’économie appliquée de Grenoble (Gael).

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