"Ma peur du ridicule m’empêche de faire du sport"
Trop « âgée » pour se mettre à la danse, trop « grosse » pour aller à la salle de sport, « pas assez forte » pour s’inscrire à la boxe ? Alors que vous avez envie de vous (re)mettre au sport, la peur de ne pas trouver sa place au milieu des autres sportifs vous bloque.
Peur qu’on se moque de nous en tenue de sport, qu’on nous juge de ne pas bien faire, ce manque de confiance mêlé à des attentes sociétales étouffantes nous empêchent finalement de se faire plaisir dans une activité qui nous ferait sans doute le plus grand bien.
Alors comment dépasser la peur du ridicule et se libérer du regard des autres en pratiquant son sport favori ?
Des normes sociales qui régissent le sport et heurte notre confiance en nous
La peur du regard des autres et du ridicule viennent « d’une image corporelle de soi qu’on a basé sur ce que la société nous a inculqué », explique Evelyne Rosalie, psychopraticienne. En effet, censé.es ressembler et nous comporter selon certains archétypes, tel celui de la fitness girl, « nous nous concentrons uniquement sur l’image qu’on renvoie, qui doit être comme ce que la société impose, et non sur nos ressentis », ajoute l’experte.
Grossophobie, culte de la minceur, codes vestimentaires : nombreux sont les diktats qui nous poussent à accorder trop d’importance à ce que les autres pourraient penser de nous, jusque dans la salle de sport. « Nous vivons dans une culture qui accorde une grande valeur à l’apparence du corps, il n’est donc pas surprenant que ‘l’anxiété de la gym’ soit répandue« , confirme Sydney Tenney, thérapeute, au HuffPost.
Andrea a pratiqué la danse classique jusqu’à ses 10 ans. Désireuse de reprendre son sport favori adulte, « l’appréhension de l’ambiance et des potentiels jugements » l’ont bloquée. « La danse classique est un sport empreint de stéréotypes de genre, de classe sociale, de morphologie. Même si je cochais les cases, j’appréhendais d’intégrer un groupe déjà formé, avec un niveau certainement meilleur que le mien du fait de l’arrêt de la discipline pendant plusieurs années », se désole la jeune assistante sociale.
Car dans le monde du sport, même amateur, les injonctions sociétales et physiques semblent d’autant plus fortes que dans le reste de la société. « Dans un univers sportif, la pression sociale peut être importante. Et se sentir obligé.e de participer à une activité sportive, parce que c’est la norme sociale, peut être vécu comme une contrainte et augmenter la peur de l’échec ou de paraître ridicule », précise le psychologue Boris Charpentier.
Un manque de confiance qui nous pousse à nous censurer
« L’anxiété de performance et une confiance en soi défaillante, c’est-à-dire une perception négative de ses propres capacités physiques » viennent amplifier cette peur de se mouvoir devant les autres ou de paraître ridicule en pratiquant une activité physique, ajoute le psychologue.
Une personnalité encline à se rabaisser peut alors suffire à annihiler l’envie pourtant présente de pratiquer un sport : « à la suite d’un mode de vie qui n’a peut-être pas été le plus sain ou d’une période générale difficile où la santé a peut-être été négligée, la confiance peuvent être particulièrement base et les pensées négatives et la comparaison peuvent prévaloir”, explique la psychologue du sport Jill Owen à Stylist UK.
C’est ce qu’a vécu Justine, responsable d’un service social : « j’ai dû arrêter le sport pendant plusieurs années, suite à un problème à l’épaule. Et au moment de m’y remettre, impossible. Je n’osais pas y aller seule, par peur du regard des autres, peur de mal faire un exercice, peur du jugement ». Finalement inscrite à la boxe, la jeune femme n’a « jamais osé y retourner » quand ses amies ont décidé d’arrêter. Aujourd’hui, sa « seule alternative » est de se rendre à la salle de musculation « tous les matins à 6h », pour éviter le monde, explique-t-elle.
Pour autant, nul besoin de d’ajouter une couche de culpabilité à cette peur qui nous empêche d’avancer. “Nous devrions reconnaître qu’il est normal de se sentir mal à l’aise dans un nouveau scénario et reconnaître que ce malaise n’indique absolument pas une insuffisance ou un manque de mérite d’être là », poursuit le Dr Owen.
Une interdiction qui nous enferme dans un cycle anxieux
En effet, si l’on prend l’exemple de la salle de musculation – lieu phare de l’exhibition du corps et de la confiance – nombreuses sont les femmes qui ne sont pas à l’aise lorsqu’elles doivent s’entraîner aux yeux de tous.tes. Même une fois inscrite, au-delà de la peur du ridicule, c’est aussi l’anxiété liés aux regards – souvent masculins – qui peut les paralyser.
Au lycée et dans son IUT, Clémence, aujourd’hui étudiante journaliste, pratiquait le fitness et la musculation avec son copain et ses ami.es. Sans ses proches, elle a décidé de tout arrêter. « Je n’ai jamais osé me réinscrire dans une salle. Pourtant, j’aimais ça, ça me faisait du bien. Mais j’ai peur de me sentir bête parce que je sais pas forcément quel exercice faire, j’ai peur de mal faire et que les gens se disent ‘qu’est-ce qu’elle fait, elle a rien compris' ».
Ainsi, afin de les aider à se dépasser physiquement malgré leurs peurs, un hashtag est apparu sur Tiktok, le : #shygirlworkout. Et ces séances d’entraînements à petite dose veulent aider « les gens à se sentir un peu plus confiants pour commencer à la salle de sport », explique l’influenceuse fitness Kelsey O’Callaghan, comme le rapporte Stylist UK. Et pousser les femmes à prendre la place qu’elles méritent dans le sport.
Car fuir toute activité par peur des autres nous enferme dans un schéma toxique d’évitement : “bien que cela atténue notre anxiété – temporairement – nous communiquons également à notre cerveau et à notre corps que la chose évitée est, en fait, une menace pour notre sécurité… Nous nous retrouvons coincés dans un cycle d’anxiété », ajoute Sydney Tenney.
Comment dépasser sa peur du regard des autres quand on fait du sport ?
Au-delà d’embrasser « le droit à l’erreur et à l’échec » et « cultiver la bienveillance et l’auto-compassion », propose le psychologue Boris Charpentier, il existe des techniques concrètes et faciles à mettre en place « pour se sentir bien dans un nouvel espace sportif”, rassure Matthieu Fafournoux, coach sportif.
Première technique : être accompagné.e d’un proche. « Cela va réduire le stress d’être en groupe. À deux, on est dans une zone de sécurité”, détaille le créateur de « We love fitness ». Autre astuce : se rendre au sport en dehors des heures de pointe. Mais aussi simplement “porter une tenue dans laquelle on se sent bien », pour maximiser sa confiance en soi, préconise le coach.
Ensuite, « se fixer des objectifs SMART (spécifique, mesurable, atteignable, réaliste, intégrés dans le temps) », propose Boris Charpentier, plutôt que de s’y rendre à l’aveugle ou avec des envies inatteignables. Pour finir, trouvez « un prof avec les mêmes valeurs, qui a une mentalité similaire à la vôtre pour créer du lien facilement ». Pour cela, n’hésitez pas à tester plusieurs structures, avant de trouver le modèle qui vous convient le plus.
Finalement, Andrea s’est réinscrite à la danse. « J’ai découvert un cours de danse classique pour adultes débutant.es, dans une école dont la volonté était justement de se faire plaisir avant tout. Ce cours est composé de femmes de tout âge, de toute morphologie, avec chacune leur propre niveau. Je m’y sens bien », se réjouit-elle. Alors que Clémence pratique aujourd’hui son sport chez elle, Justine, de son côté, a l’ambition l’année prochaine de dépasser ses peurs en s’inscrivant « dans un sport solo comme la boxe ».
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