Les nouveaux challenges des cinémas sur la Côte d’Azur
- Le cinéma se porte mal en France, au niveau des fréquentations, d’après les dernières études publiées.
- Les plateformes de streaming ont « volé » ces spectateurs qui ne se déplacent plus pour voir des films.
- Face à ce constat, et à d’autres facteurs, les gérants azuréens réfléchissent à des solutions pour faire revenir les spectateurs.
La semaine dernière, à la veille du lancement de la 75e édition du Festival de Cannes, sortait une étude commandée à l’Ifop par l’Association française des cinémas d’art et essai, avec un constat : les plateformes de streaming vidéo privent les salles de ses spectateurs.
La Côte d’Azur, vitrine du cinéma français mais aussi terre de tournage et nouveau lieu pour la formation, avec la Bastide Rouge à Cannes et les partenariats avec l’ ENS Louis Lumière, le Cours Florent et Amazon Prime aux studios de la Victorine à Nice, n’échappe pas à cette réalité.
Des équipements de qualité
Comme « partout en France », « on est dans une morosité ambiante », lâche seulement Philippe Borys-Combret, président de la Compagnie cinématographique de Cannes, qui ne souhaite pas davantage s’exprimer sur le sujet. Il assure que la cité des festivals est « dans les chiffres nationaux, qui ne sont pas bons du tout ». Et ce, malgré l’ouverture à la Bocca, l’an dernier, du Cineum avec 12 salles, 2.450 places et un écran géant de 24 mètres ainsi que toutes les dernières technologies pour une projection.
A Nice aussi, un nouveau multiplex s’est installé en fin d’année 2021. Le Megarama avec 10 salles qui peuvent accueillir 1.500 personnes, vient alors compléter l’offre existante qui était surtout concentrée sur l’ouest de la ville.
Pour Savanna Samokine, directeur des cinémas Pathé à Nice, ces « concurrents » font partie des facteurs qui le poussent à « se bouger, à surprendre » pour que les spectateurs viennent en salle. Et ça passe effectivement par des équipements de haute technologie. « Les fauteuils confortables mais aussi les qualités d’image et de son exceptionnelles, c’est finalement ce qui plaît. A chaque sortie de grands films, la salle Dolby du cinéma de la Gare du Sud affiche toujours complet et d’une manière générale, c’est celle qui est le plus au top. On comprend alors que les gens veulent vivre une expérience. »
« On ne peut plus se contenter d’ouvrir les portes pour que les spectateurs rentrent »
Dans cette optique, les cinémas Pathé à Nice proposent désormais des « animations » autour des sorites des films. Le directeur reprend : « Pour la sortie du dernier « Top Gun », on a réfléchi à différentes activités pour se mettre dans l’ambiance. Jeudi dernier, on a proposé un ciné-débat et la salle était pleine. On crée des événements. On ne peut plus se contenter d’ouvrir les portes pour que les spectateurs rentrent, il faut quelque chose en plus. »
Selon lui, la qualité des équipements et la création d’événements sont autant de solutions pour « montrer la différence avec l’expérience plateformes ». Il poursuit : « Il faut travailler avec ces nouveaux outils parce qu’on fait face à un paysage audiovisuel qui change mais je persiste à croire que le cinéma n’a rien à voir le fait d’être tout seul devant sa télé. C’est une salle, c’est la sortie d’un film, les émotions partagées à la projection. Et un événement autour de « Top Gun », vous ne le verrez pas dans votre salon. »
Une politique que tiennent également les cinémas d’art et d’essai de Nice. Thierry Duchêne, directeur du Variétés et du Rialto, insiste sur la nécessité d’avoir une plus-value pour faire revenir les spectateurs, partis depuis « les confinements et le pass sanitaire ». « Quand un film est présenté puis que suit une discussion, ça apporte aux spectateurs quelque chose qu’ils ne peuvent pas retrouver ailleurs. Il faut alors sans cesse innover, penser à des trucs originaux. »
Le soleil, ce concurrent redoutable
Le Covid-19 est alors l’un des responsables de la désertification des salles. Mais l’augmentation du prix des places pourrait également jouer dans la balance. D’après les chiffres de la CNC, Nice est la 4e ville de plus de 50.000 habitants, la plus chère avec en moyenne une place à 7,69 euros. Pour Savanna Samokine, ce n’est pas une « raison valable » sachant que « le plein tarif est celui dont la part est la moins haute ». Il explique surtout ce facteur économique par « l’augmentation générale de l’inflation ». « Le loisir est la première victime lorsqu’on a moins de moyens, même si le cinéma reste l’un des loisirs préférés des Français et surtout, le moins cher des spectacles de la culture. »
La consommation des films serait alors, d’après lui, plus « réfléchie » mais « différente ». Pour Henry Jean Servat, conseiller municipal subdélégué au cinéma, « s’il n’y a plus de public, ce n’est pas par rapport aux prix ou à l’offre cinématographique, au contraire. C’est cet ensemble lié la crise sanitaire. » Et il expose également un autre problème local : la météo. « Les Niçois n’ont pas envie d’aller dans une salle quand il fait beau [il y a trois cents jours d’ensoleillement par an]. Et les personnes étrangères, quand elles viennent en vacances, ce n’est pas pour se rendre au cinéma. »
Le directeur chez Pathé Nice voit alors cette situation comme un challenge : « On va réfléchir à des horaires après le retour des plages, proposer davantage de films en version originale, et s’adapter d’une manière générale à la population, les touristes compris. Et il suffit qu’il y ait un jour de pluie pour que les cinémas de la ville soient remplis ! »
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