Les lettres d'amour des écrivains | Vogue Paris

Des célèbres échanges épistolaires entre Alfred de Musset et George Sand aux centaines de lettres qu’Albert Camus échangea avec Maria Casarès, récemment publiées, Vogue revient sur les plus belles correspondances amoureuses des écrivains.

Des célèbres échanges épistolaires entre Alfred de Musset et George Sand aux centaines de lettres d'amour qu’Albert Camus échangea avec Maria Casarès, retour sur les plus belles correspondances amoureuses des écrivains. Un autre point de vue sur les grands noms de la littérature et parfois sur leurs œuvres, à des époques où les passions amoureuses s’inscrivaient encore sur le papier.

Henry Miller et Anaïs Nin

C’est peu après s’être installé à Paris qu’Henry Miller rencontre Anaïs Nin. Tombés follement amoureux, les auteurs respectifs de Tropique du Cancer et Vénus Erotica entretiendront, de 1932 à 1953, une correspondance quotidienne à travers laquelle on lit la puissance des sentiments qu’ils nourrissent l’un pour l’autre, à la croisée des émotions amoureuses et littéraires qu’ils partagent, mais aussi l’évolution de leurs écrits et leurs relations aux milieux artistiques dans lequel ils gravitent.

L'extrait : « La vie et la littérature mêlées, l’amour comme dynamo, toi avec ton âme de caméléon, m’offrant mille sortes d’amour, toujours là, solide, quelle que soit la tempête que nous traversons, nous sentant partout chez nous. Poursuivant, chaque matin, la tâche là où nous l’avions laissée. Résurrection sur résurrection. Toi, prenant de plus en plus d’assurance et menant la vie riche que tu désires ; et plus tu prends de l’assurance, plus que tu me veux, plus tu as besoin de moi. Ta voix devient plus rauque, plus profonde, tes yeux plus noirs, ton sang plus épais, ton corps plus plein. Une servilité voluptueuse, une nécessité tyrannique. Plus cruelle que jamais – consciemment, délibérément cruelle. Le plaisir sans fin de l’expérience. » Henry Miller à Anaïs Nin, 14 août 1932

Correspondance passionnée d’Anaïs Nin et Henry Miller

Correspondance passionnée d’Anaïs Nin et Henry Miller, éditions Stock, 640 pages, 22,40 €

Alfred de Musset et George Sand

À partir de 1833, les deux auteurs romantiques entretiennent une relation tumultueuse et passionnée, qui s’achève brutalement en 1835. Il en reste l’une des correspondances les plus célèbres de la littérature française, dont les extraits les plus célèbres offrent une double lecture, aussi romantique et poétique qu’érotique et crue. En témoignent ces vers envoyés par Musset à Sand, dont chaque premier mot, mis bout à bout, composent une question autrement plus directe.

L'extrait : « Quand je mets à vos pieds un éternel hommage,
Voulez-vous qu'un instant je change de visage ?
Vous avez capturé les sentiments d’un cœur
Que pour vous adorer forma le créateur.
Je vous chéris, amour, et ma plume en délire
Couche sur le papier ce que je n’ose dire.
Avec soin de mes vers lisez les premiers mots,
Vous saurez quel remède apporter à mes maux. »

Correspondance de George Sand et d’Alfred de Musset

© Hachette/BnF

Correspondance de George Sand et d’Alfred de Musset, édition Hachette Bnf, 212 pages, 15 €

Albert Camus et Maria Casarès

C’est en 1944 qu’Albert Camus et l’actrice Maria Casarès deviennent amants, alors que Camus réside à Paris et sa femme, Francine Faure, à Oran. Quatre ans plus tard, ils entament une relation qui durera jusqu’à la mort de l’écrivain, en 1960, et dont il reste une riche correspondance de plusieurs centaines de lettres, qui témoignent d’un amour à vif, inconditionnel, de la souffrance de l’absence et des multiples réflexions qu’engendre l’amour dans l’esprit humain, à l’image de celles qui traversent l’oeuvre d’Albert Camus.

L'extrait : « Je suis si heureux, Maria. Est-ce que cela est possible ? Ce qui tremble en moi, c’est une sorte de joie folle. Mais en même temps j’ai cette amertume de ton départ et la tristesse de tes yeux au moment de me quitter. Il est vrai que ce que j’ai de toi a toujours un goût mêlé de bonheur et d’inquiétude. Mais si tu m’aimes comme tu l’écris, il faut que nous obtenions autre chose. C’est bien notre temps de nous aimer et il faut que nous le voulions assez fort et assez longtemps pour passer par-dessus tout. » Albert Camus à Maria Casarès, juin 1944

Correspondance

© Gallimard

Correspondance (1944-1959), d’Albert Camus et Maria Casarès, éditions Gallimard, 1312 pages, 32,50 €

Guillaume Apollinaire et Louise de Coligny Chatillon

Dans ses lettres à « Lou », rencontrée en 1914 dans un restaurant de Nice, Guillaume Apollinaire fait état de sa passion dévorante pour cette jeune femme avec qui il vivra une histoire d’une semaine à peine, à la veille de son départ au front. Ils entretiennent jusqu’en 1916 une correspondance amoureuse et érotique, dans laquelle on lit le désespoir d’Apollinaire devenu soldat et les jeux cruels de son amante, qui lui parle de ses fantasmes autant que de ses conquêtes.

L'extrait : « Vingt-quatre heures se sont à peine écoulées depuis cet événement que déjà l’amour m’abaisse et m’exalte tour à tour si bas et si haut que je me demande si j’ai vraiment aimé jusqu’ici. Et je vous aime avec un frisson si délicieusement pur que chaque fois que je me figure votre sourire, votre voix, votre regard tendre et moqueur il me semble que, dussé-je ne plus vous revoir en personne, votre chère apparition liée à mon cerveau m’accompagnera désormais sans cesse. » Guillaume Apollinaire à Louise de Coligny Chatillon, septembre 1914

Lettres à Lou de Guillaume Apollinaire

© Gallimard

Lettres à Lou de Guillaume Apollinaire, éditions Gallimard, 548 pages, 13,50 €, Lettres à Guillaume Apollinaire de Louise de Coligny Chatillon, éditions Gallimard, 128 pages, 12 €

Victor Hugo et Juliette Drouet

En 1833, Juliette Drouet, actrice, joue le rôle de Princesse Négroni dans la pièce Lucrèce Borgia de Victor Hugo. Alors que l’écrivain est marié, ils entament une liaison qui durera près de cinquante ans, durant laquelle elle deviendra sa muse, sa collaboratrice et sa protectrice, le suivant dans ses différents exils, peu importe la présence de sa femme. durant ces cinq décennies, le couple a échangé plus de 23 000 lettres d’amour.

L'extrait : « Ma vertu c’est de t’aimer, mon corps, mon sang, mon cœur, ma vie, mon âme sont employés à t’aimer. En dehors de mon amour, je ne suis rien, je ne comprends rien, je ne veux rien. T’aimer, t’aimer, t’aimer, voilà ma seule et unique destination. Je n’en pourrais et ne saurais en avoir d’autres, quand bien même je le désirerais, parce que toutes mes forces et toute volonté tendent à t’aimer uniquement. » Juliette Drouet à Victor Hugo, janvier 1862

Correspondance 1833-1883 de Victor Hugo et Juliette Drouet, éditions Fayard, disponible sur Amazon

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