Les années 2010 ont-elles été un nouvel âge d'or pour le rap français ?

  • Le rap a été traversé par de nombreux phénomènes lors de cette dernière décennie.
  • Le hip-hop est devenu la musique la plus écoutée et a connu une forme d’âge d’or.
  • Diversité, richesse et autonomie, « 20 Minutes » revient sur les points forts de cette dernière décennie.

Et si le rap français n’avait jamais connu meilleures années que les années 2010 ? Musique la plus écoutée de ce début de siècle (n’en déplaise aux rageux), elle a connu une envolée spectaculaire lors de cette dernière décennie : multiplicité des projets, variété et richesse des styles et des artistes, augmentation des certifications d’albums… Sans oublier les classements des plateformes de streaming, qui parlent d’eux-mêmes. Chez Spotify France, le deuxième titre le plus écouté de la décennie n’est autre
qu’Au DD de
PNL, qui se place derrière Shape of You de l’indétrônable Ed Sheeran, et juste devant O. Macarena de Damso. Au total, sept rappeurs francophones squattent ce top 10.

Mais ce n’est rien comparé au classement des 10 artistes les plus écoutés depuis 10 ans. Dans l’ordre : Jul, PNL, Ninho, Damso, Nekfeu, Booba, Niska, Drake, Maître Gims et Orelsan. Un raz de marée. Notons que le seul artiste anglophone du classement officie également dans le rap. Mais hormis les chiffres, que s’est-il passé pour le rap français dans les années 2010 ?

Du rap made in France

L’un des faits les plus remarquables de ces dernières années, c’est l’accession à la notoriété d’artistes de tous horizons. Fini le partage du rap hexagonal entre Marseille, Paris et sa banlieue, la province a considérablement mis un pied dans le game. A commencer par le caennais Orelsan, qui mériterait amplement le titre de rappeur français de la décennie, ou du moins une bonne place dans le top 3. Des albums d’anthologie (Le chant des sirènes, La fête est finie), des tubes (Basique, Défaite de famille), des récompenses à gogo (des Victoires de la musique notamment), Orelsan n’a pas chômé. Mais on pourrait citer d’autres rappeurs qui sortent des sentiers battus, comme
Bigflo et Oli de Toulouse,
Gradur de Roubaix, Columbine de Rennes, Kikesa de Nancy… Et la scène belge bien entendu, qui s’est taillé une place de choix dans le rap game francophone. Comment ne pas penser à Damso, Roméo Elvis, ou encore Caballero et JeanJass ?

Pour tous les goûts

Et qui dit diversité d’artistes, dit variétés de styles. Si la trap a largement influencé la scène hexagonale, et que l’autotune a encore pris du galon, ce qu’il faut retenir des années 2010, c’est surtout que le rap est incontestablement une musique riche et intergénérationnelle. Une culture qui tire vers la pop parfois, avec Lomepal, l’autodérision avec 47Ter, le trash avec Alkpote, la chanson française avec Gims… On trouve aussi bien des sons taillés pour les clubs du côté de Gradur ou Vegedream, comme des titres engagés, voire militants, comme ceux de Médine ou de Kery James ; des morceaux planants, de PNL, Maes, à d’autres plus offensif comme avec Kaaris ou encore
Niska. Et l’on ne cite que les plus visibles, impossible de faire état en un article de l’abondance du rap français, commercial, indé ou underground. Notons juste que l’avenir s’annonce prometteur avec une nouvelle génération prête à en découdre avec Zola, Koba LaD, RK, Gambi, Larry, Tsew The Kid…

Des artistes de plus en plus autonomes

Ce qui ressort de cette décennie, c’est aussi la capacité de nombreux artistes à s’émanciper des voies médiatiques classiques. En communiquant directement sur les réseaux sociaux et en instaurant une forte proximité avec leur public, comme Jul, ou en évitant soigneusement les médias comme Booba, qui a monté sa propre radio OKLM en 2016, et dont les interviews se font de plus en plus rares. Mais qui a occupé l’espace médiatique avec son histoire d’octogone avec Kaaris… D’autres artistes fondent eux-mêmes leur propre mythe, comme PNL, qui alternent depuis 2015 entre rareté et gros coups de com, allant jusqu’à squatter le sommet de la tour Eiffel. Sans parler de Nekfeu, aussi désiré qu’imprévisible, qui dynamite les canaux de diffusion habituels, en annonçant ses sorties d’albums en plein concert ou dans un documentaire diffusé lors d’une séance unique. Chapeau.

Où sont les femmes ?

Grosse ombre au tableau, si le rap français connaît un second âge d’or, il n’en va pas de même pour les artistes féminines, qui se font encore très rares. Si les rappeuses ne manquent pas, peu d’entre elles arrivent à se faire une place notable dans le milieu, si ce n’est
Chilla,
Shay ou Lala & ce. On compte sur les années 2020 pour que les maisons de disques, les fans de rap, les médias et les artistes masculins réservent enfin aux femmes la place qu’elles méritent.

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