Le coaching menstruel, nouvelle voie de l’accomplissement féminin ?

Optimiser nos performances physiques et professionnelles en surfant sur notre cycle menstruel plutôt que de le subir : c’est la proposition d’un coaching pionnier et salutaire qui invite à nous ré ancrer dans notre réalité hormonale. On assume ?

Plus qu’une énième tocade New Age des fans de féminin sacré, tirer le meilleur parti de notre cycle ovarien fait l’objet de recherches rigoureuses dans l’univers du sport de haut niveau.

Souvenez-vous : l’été dernier, les joueuses américaines de football crèvent l’écran pendant la coupe du monde féminine. Dans la foulée, la presse révèle que leurs prouesses dérivent – en partie – de la prise en compte du cycle menstruel dans leur training. « Rien n’a été révélé sur la manière dont leurs entrainements ont été adaptés. On sait simplement que, sur ce plan, elles sont coachées par une docteur en nutrition qui s’est concentrée sur la qualité de leur récupération : supplémentation alimentaire, sommeil, hydratation… des aspects déterminants de la performance », commente Pierre-Hugues Igonin, préparateur physique de l’équipe de football féminine de l’AS Saint-Etienne.

Doctorant à l’Université Claude Bernard – Lyon 1, l’expert prépare une thèse sur les effets du cycle menstruel sur les facteurs de performance dans le football féminin de haut niveau. 

Des performances physiques liées au cycle menstruel

Agilité, vitesse, force et vivacité des joueuses, mais aussi humeur ou confiance en soi… les tests sont menés sur une quarantaine de joueuses de l’AS Saint-Etienne pendant les règles, pendant la période d’ovulation, et dix jours après. « A l’heure actuelle, on ne communique pas sur les résultats, ni même sur les hypothèses. Etant données les modifications psychologiques et physiologiques induites par les variations hormonales au cours du cycle, il serait toutefois logique que cela impacte la performance », analyse le préparateur physique.

A chaque période ovarienne, son sport

Certitude prouvée par plusieurs études : le risque de blessure articulaire est plus important au cours de la période folliculaire, soit pendant les quatorze premiers jours du cycle, incluant les règles. D’une part, les ligaments sont alors à leur laxité maximale, action hormonale oblige. D’autre part, les règles qui ouvrent le cycle engendrent de la fatigue mais aussi une baisse de l’attention vis-à-vis de l’extérieur. D’où la nécessité de soigner les échauffements pendant ces jours à risques – gare aux ligaments croisés.

D’après Pierre-Hugues Igonin, pendant la période lutéale (les jours qui suivent l’ovulation jusqu’au déclenchement des règles), la fréquence cardiaque est plus élevée qu’à la normale, aussi bien au repos qu’à l’effort. « A charge identique, les femmes ont l’impression que la tâche à réaliser est plus difficile », commente-t-il. Il serait donc préférable d’effectuer les exercices intenses pendant la phase folliculaire, du moins après les règles, malgré le risque de blessure plus important : « les entrainements seraient plus efficaces tout simplement car les œstrogènes, hormones alors présentes en plus grande quantité, ont un effet bénéfique sur les muscles », explique l’expert.

A l’inverse, après le pic d’ovulation, les effets de la progestérone s’installent, contraires à ceux des œstrogènes. « Préférez à ce moment-là les sports d’endurance douce et reposez-vous si le syndrome prémenstruel se fait sentir », préconise-t-il.

Se mettre à l’écoute de notre cycle

Pour la coach certifiée Gaëlle Baldassari, cette approche inédite qui pointe dans l’univers du sport devrait être étendue à tous les aspects de notre vie. Auteure de Kiffe ton cycle, (Ed. Larousse), un livre dans lequel elle invite les femmes à bien connaître leur cycle pour vivre mieux, cette ancienne directrice d’agence bancaire a mis au point un système de coaching pionnier qui prend en compte l’influence du systèmes nerveux et endocrinien.  L’idée : « hacker » le cycle menstruel afin d’en faire un atout pour booster la confiance en soi, gagner en endurance, mieux se comprendre et s’accepter.

« Parce qu’elles fonctionnent de manière cyclique, les femmes vivent en permanence sous la coupe de variations physiologiques, émotionnelles et psychologiques : tantôt on a la sensation de traîner un boulet qui nous ralentit ; d’autres fois on a une énergie débordante dont on ne sait plus que faire, ou encore on a envie de tout envoyer valser », décrit la professionnelle. En vogue outre Atlantique, des applications Clue ou Menstrual Period Tracker proposent déjà de nous aider à suivre notre cycle. Malheureusement, on a découvert récemment que certaines, à l’instar de MIA et MAYA, ont partagé ces informations personnelles à Facebook.

Aussi, Gaëlle Baldassari préconise de se mettre à l’écoute de notre corps et de nos émotions pour accueillir l’état dans lequel on est chaque jour. « C’est quasiment la plus grosse partie du travail. Cette démarche n’est pas naturelle car on ne nous l’apprend pas », déplore la coach qui distingue quatre phases dans le cycle ovarien. « Chacune a son intérêt pour la réalisation d’un projet, même si la société nous apprend à en détester certaines. J’œuvre à mettre en exergue l’aspect positif de ces états-là et le négatif dans ceux qu’on nous a appris à adorer », sourit-elle.

Les règles, zone anti burn-out 

L’énergie comme les humeurs varient au fil des quatre phases qui rythment le cycle menstruel. La période des règles (jours 1 à 5 environ) reste la plus compliquée pour de nombreuses femmes. Le niveau d’hormones est bas. Fatigue, sensation d’être tirée vers le fond… cet état est mal jugé socialement. Pourtant, c’est une parenthèse salutaire car nous sommes en position de recul, « comme en orbite sur la lune ». Cela nous permet de faire un bilan de notre activité avec la bonne distance, de nous ouvrir à d’autres façons d’appréhender notre projet et de rectifier si besoin une stratégie, un comportement.

« Cette zone de fatigue est aussi un point de ressourcement. Nous avons beaucoup plus de chances d’aller au bout de nos objectifs en acceptant de nous reposer régulièrement durant cette période que si nous demeurons en tension permanente », complète Gaëlle Baldassari.

Maîtriser le tremplin post-règles

Après les règles, la seconde partie de la phase folliculaire (jours 5 à 11 environ) se caractérise par une production d’hormones qui déclenche une remontée d’énergie. Durant cette formidable zone de prise d’élan, on a l’énergie de faire un tas de choses. »Notre capacité intellectuelle est décuplée. Par contre, cette « pêche » nous rend parfois très cassante avec notre entourage professionnel ou personnel », prévient la coach. En mode « qui m’aime me suive », on devient vite intolérante face aux personnes qui nous ralentissent. Evitez donc d’idéaliser cet état de puissance de réalisation qui a ses contreparties.

En phase d’ovulation, nous baignons dans un amour inconditionnel pour le monde entier, on a envie de communiquer avec les autres

Autre écueil : sans plan d’action dessiné en amont, on risque de partir dans tous les sens et de dissiper notre belle énergie, avec la désagréable sensation de n’avoir rien fait, une fois arrivée en fin de cycle. D’où l’importance de s’organiser pendant les règles pour être prête à agir à bon escient quand l’énergie pointe. « Physiquement, on est à fond, on peut oublier de manger ou mal se nourrir car le corps ne demande rien de particulier », ajoute Gaëlle Baldassari. Dommage… c’est la période où nous devrions faire le plus attention à notre équilibre alimentaire, histoire d’adoucir la seconde partie de cycle : les compulsions alimentaires du syndrome prémenstruel tirent en grande partie leur source d’une mauvaise alimentation pendant la phase folliculaire.

Le monde bisounours de l’ovulation

Vient ensuite la phase d’ovulation (jours 11 à 17 environ), dont le cocktail hormonal favorise l’empathie et l’écoute, à en croire l’experte. « Nous baignons dans un amour inconditionnel pour le monde entier, on a envie de communiquer avec les autres ».

Le hic ? On a tendance à dire oui à tout va pour nourrir la relation, ce qui nous met parfois dans des situations inconfortables par rapport à nos projets et nos priorités. La prise de conscience se fait souvent trop tard, une fois l’effet bisounours estompé. Le conseil de la coach : pendant cette période, mieux vaut bien réfléchir avant de dire oui en se demandant si cela aide vos objectifs. Sauf dérèglement hormonal, il s’agit d’une période où l’on se sent bien, profitons-en avant la bascule de marée !

Le challenge de la zone prémenstruelle

Durant la phase dite lutéale (jours 17 à 28 environ), la progestérone et l’œstradiol débarquent et nous chahutent émotionnellement. Repli sur soi, découragement, immobilisme… c’est la période des moments ambivalents que 80% des femmes jugent inconfortable à vivre. A son paroxysme, on déguste le fameux syndrome prémenstruel (SPM). Déprime, gonflements, peau sensible, boutons sur le visage, maux de crâne, fatigue et autres manifestations sont mal vues de la société et souvent dissimulées par les femmes. Pour Gaëlle Baldassari, c’est au contraire une phase très utile.

« On voit les choses de manière plus sombre, ce qui permet de repérer et cerner les problèmes qui freinent nos projets », décrit la coach. Cette dernière compare la zone prémenstruelle à un expert qui viendrait chaque mois réaliser un audit interne gratuit, à la recherche de tout ce qui ne va pas : « il peut faire un travail formidable à condition de ne pas le museler ; accueillez-le et laissez-le faire son boulot » !

Ces variations d’énergie cycliques influencent inévitablement la façon de travailler mais l’entreprise fonctionne sur un mode linéaire, masculin

Autre point positif : durant ces jours à la vibration très particulière, la femme bénéficie d’une forte créativité car elle est au plus près d’elle-même. « Le masque social tombe, les idées qui viennent nous ressemblent », éclaire la professionnelle.

C’est aussi l’heure de faire attention à soi : se cocooner, porter des vêtements plus souples et une taille de soutien-gorge au-dessus de la normale car on a tendance gonfler, aller au hammam si on en ressent le besoin… plus nous prenons soin de nous-mêmes à ce moment-là, moins nous serons sujettes aux sautes d’humeur et aux émotions en yoyo.

Apprendre à surfer sur nos phases ovariennes

Interne, gratuit, disponible en continu pour nous… Pour Gaëlle Baldassari, notre cycle est « notre meilleur coach » !  Il nous aide à nous réaliser, à condition d’apprendre à l’écouter. C’est la proposition de sa formation d’auto-coaching en ligne qui s’adresse aux femmes à partir 16 ans via des vidéos envoyées sur un temps de huit semaines proposée sur Kiffe ton cycle. Une démarche à s’approprier pendant la période fertile et durant la péri ménopause, « une période où tout est chahuté, parfois sans ovulation, où il est particulièrement intéressant de s’accueillir telle que l’on est ».  Une version « Kiffe tes premières règles » existe aussi pour les 10-15 ans.

L’experte a par ailleurs créé le « sommet du cycle menstruel », en accès gratuit sur le net : une vingtaine de spécialistes interviennent en ligne sur des thématiques diverse, quatre fois par an.

Se synchroniser avec notre cycle n’est pas toujours simple face à la cadence de la vie professionnelle. « Ces variations d’énergie cycliques influencent inévitablement la façon de travailler mais l’entreprise fonctionne sur un mode linéaire, masculin », déplore Gaëlle Baldassari. Certaines méthodes de management évaluent par exemple le personnel en fonction de la stabilité de leurs performances, semaine après semaine ; une approche discriminante vis-à-vis des femmes.

Dans un monde parfait, le monde professionnel accepterait que les salariées soient plus efficaces à certains moments et plus en retrait à d’autres… En Suède, une ONG a mis en place un label qui valorise les entreprises qui s’adaptent aux femmes. En France, le chemin reste à faire.

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