Jennifer Arcuri, l’entrepreneuse de la tech devenue l’épine dans le pied de Boris Johnson
Boris Johnson est soupçonné d’avoir octroyé des subventions à une jeune entrepreneuse alors qu’il était maire de Londres. La principale intéressée a décidé de s’exprimer publiquement dans une interview diffusée à la télévision ce dimanche. Une intervention qui ne devrait pas arranger les affaires du premier ministre britannique.
Une Californienne de 34 ans et de l’argent public. C’est l’autre dossier brûlant qui préoccupe ces derniers mois Boris Johnson. Comme si la bataille pour le Brexit ne suffisait pas. Le sujet faisait la une de la presse britannique début octobre. Et pour cause : le premier ministre britannique est sous le coup d’une enquête pour des soupçons de conflit d’intérêts et de favoritisme. Le Sunday Times a révélé l’histoire le dimanche 29 septembre. Selon le quotidien, plus de 126.000 livres sterling (soit 142.000 euros environ) d’argent public et de subventions auraient été accordées à Jennifer Arcuri, 34 ans, un ancien mannequin reconverti femme d’affaires. Il apparaîtrait, en outre, que ses liens étroits avec l’homme fort du Royaume-Uni lui auraient permis de participer à des missions commerciales et d’obtenir des contrats de sponsoring dont elle et ses sociétés n’auraient pas pu bénéficier autrement.
Seulement, si le dossier refait surface en pleine campagne pour les élections générales du 12 décembre, c’est bel et bien parce que l’entrepreneuse a décidé de prendre la parole. Cette fois, pour pointer du doigt le comportement de Boris Johnson. Dans une interview qui doit être diffusée ce dimanche 17 novembre sur la chaîne ITV, la jeune femme reproche au Prime Minister son comportement lorsque les accusations de conflit d’intérêt les concernant ont éclaté. «Je ne comprends pas pourquoi tu m’as bloquée et ignorée comme si j’étais un coup d’un soir ou une fille que tu aurais rencontrée dans un bar, parce que ce n’est pas ce que je suis, et tu le sais très bien», déclare-t-elle à l’adresse du sucesseur de Theresa May, selon des extraits retranscrits par l’agence Press association. Puis d’ajouter : «J’ai le coeur brisé par la manière dont tu m’as mise de côté comme si j’étais une créature maléfique.» Un témoignage qui ne devrait pas arranger les affaires de Boris Johnson. Celui-ci est en ce moment occupé à récupérer une majorité parlementaire pour pouvoir voter son accord sur le Brexit.
Passionnée de nouvelles technologies
Jennifer Arcuri, 34 ans, a rencontré Boris Johnson en 2012, lorsqu’il était encore maire de Londres.
Pour comprendre l’affaire, il faut remonter en 2011. Jennifer Arcuri vient de quitter son pays natal, les États-Unis, pour partir vivre à Londres. Ex-mannequin, l’Américaine avait commencé sa carrière comme DJ pour une radio Disney, comme l’indique son profil sur IMDb, avant de s’intéresser au cinéma. En 2008, son court-métrage La Valise – un film qu’elle produit et réalise – était sélectionnée par l’une des sections parallèles du Festival de Cannes. Une fois installée dans la capitale britannique, elle se donne un objectif : celui de se reconvertir dans les nouvelles technologies. Quelques mois après son arrivée, en 2012, elle fait la connaissance de Boris Johnson, maire de Londres depuis quatre ans. Jennifer Arcuri va au bout de son idée et lance dès 2013 un salon de l’innovation, Innotech, auquel le «tory» participe plusieurs fois.
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Une liaison avec l’ancien maire de Londres ?
Boris Johnson face aux rumeurs
Dimanche 29 septembre, une journaliste du « Sunday Times », Charlotte Edwardes, révélait avoir été victime d’un comportement inapproprié de la part du premier ministre britannique. Dans les colonnes de l’hebdomadaire, elle raconte que celui-ci lui aurait pincé la cuisse sous la table, lors d’un dîner privé au siège du « Spectator », dont il était alors le rédacteur en chef à la fin des années 1990, et qu’il aurait fait la même chose à sa voisine de droite.
Quelle relation entretenait «BoJo» avec la businesswoman ? Les spéculations vont bon train outre-Manche. À en croire The Sun, les deux principaux intéressés étaient très proches. En témoignent les visites «régulières» de l’édile londonien au domicile de l’Américaine, qui disposait au début des années 2010 d’un appartement dans le quartier branché de Shoreditch. Le Sunday Times n’hésite pas, quant à lui, à parler de «sexual affair». David Enrich, rédacteur en chef au New York Times, est catégorique : Jennifer Arcuri a bel et bien eu une liaison avec l’actuel homme fort du Royaume-Uni, alors que celui-ci était encore mariée à Marina Wheeler, avocate et mère de ses quatre enfants. Des faits qui lui auraient d’ailleurs été rapportés par des amis de l’Américaine en personne.
Toujours selon le Sunday Times, les liens qui unissent à l’époque Boris Johnson à l’entrepreneure ont leur importance. Ceux-ci permettent en effet à cette dernière de décrocher un contrat de sponsoring en 2013, pour un montant de 10.000 livres sterling (11.200 euros) et un autre de 1500 livres sterling (1700 euros). Mais cela ne s’arrête pas là. En 2014, Jennifer Arcuri reçoit également 15.000 livres sterling (17.000 euros) de fonds gouvernementaux, dans le cadre d’un programme destiné à encourager les entrepreneurs étrangers à monter des sociétés au Royaume-Uni. Cette année-là, elle parvient même à obtenir 100.000 livres sterling (112.000 euros) de fonds destinés aux entreprises britanniques, alors qu’elle est repartie vivre aux États-Unis, à Los Angeles, où elle a monté The Hacker House, une société spécialisée en cybersécurité. Pour cette raison, la somme a depuis été gelée par le gouvernement.
« De fausses allégations »
De leur côté, Jennifer Arcuri et Boris Johnson battent en retraite. Certes, ils étaient amis mais rien de plus, martèlent-ils. «Tout a été fait dans les règles», a assuré le premier ministre dimanche 29 septembre à Andrew Marr, l’intervieweur vedette de la BBC. Selon Le Monde, Boris Johnson dispose désormais de deux semaines pour se justifier par écrit à l’Autorité du Grand Londres. Même son de cloche du côté de l’Américaine. «Toutes les allégations sont fausses», dénonce-t-elle, comme le rapporte The Guardian. «C’est une attaque orchestrée contre moi. Je maintiens la légitimité de mon entreprise. Je suis en fait une femme d’affaires légitime.» Puis d’ajouter : «C’est tellement dommage de voir des femmes d’affaires ayant du succès, ou simplement des femmes d’affaires en général, être persécutées.» Quid de sa relation avec le fervent Brexiter ? L’Américaine est catégorique, «cela ne regarde personne», a-t-elle notamment déclaré au Sun lundi 7 octobre. En revanche, le comportement de Boris Johnson à son égard, lui, reste un problème.
Cet article initialement publié le 3 octobre 2019 a été mis à jour.
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