Jeannie Longo, la pionnière du cyclisme "qui gagne toujours"

  • Jeannie Longo, la “terminator” du cyclisme féminin
  • Des accusations de dopage qui ne stoppe pas sa course
  • Un parcours semé d’embûches sexistes
  • Invitée spéciale du Tour de France Femmes 2022

Alors que le Tour de France Femmes, vient de s’ouvrir, une vidéo d’archive republiée ce dimanche 24 juillet 2022 par le média Brut rappelle les remarques sexistes et machistes qui ont longtemps entouré le vélo féminin.

Dans la vidéo en question on y voit Marc Madiot, ancien coureur professionnel exprimer son aversion pour le cyclisme féminin à la coureuse Jeannie Longo, dans l’émission “Chacun son tour”.

« Voir une femme danser c’est très joli, voir une femme sur un vélo, c’est moche, je le dis ! Je regarderai le cyclisme féminin le jour où elles mettront des maillots, des cuissards et des chaussures un peu plus jolis », lançait-il.

Des remarques sexistes auxquelles Jeannie Longo est habituée. En effet, un an plus tôt, en juillet 1986, sur le plateau de la même émission, elle avait déjà été confrontée à la désobligeance du cycliste Laurent Fignon. « Une femme sur un vélo, je ne trouve pas ça très esthétique. Bon j’aime pas voir des femmes faire du football non plus« , rétorquait-il.

Retour sur le parcours de celle qui est devenue une championne du cyclisme, à une époque où les remarques sexistes pleuvaient et que les financements manquaient.

Jeannie Longo, la “terminator” du cyclisme féminin

Jeannie Longo voit le jour le 31 octobre 1958 à Annecy. Fille de la montagne, elle débute sa carrière sportive en se tentant au ski alpin. Douée, elle intègre même l’équipe de France universitaire et enchaîne les récompenses, comme elle les répertorie sur son site.

Ce n’est qu’à l’âge de 20 ans que la sportive troque finalement ses skis contre un vélo. « Je suis presque venue au vélo par accident. Je m’entraînais à vélo l’été, mais j’étais d’abord skieuse. Et un jour, on m’a conseillée de prendre une licence de cyclisme pour voir ce que ça donnerait », raconte-t-elle dans une vidéo publiée sur le site de l’INA.

Elle gagne toujours, à tel point qu’on la surnomme Terminator.

En 1978, elle a 21 ans quand elle est sacrée championne de France sur route. Un exploit qu’elle réitérera deux fois de suite.

En parallèle, Jeannie Longo domine également le cyclisme mondial puisqu’elle remporte 13 titres de championne du monde, une victoire olympique lors des jeux d’Atlanta en 1996 et une médaille d’argent sur route aux Jeux olympiques de Barcelone, en 1992.

“À 42 ans, elle est encore sur le vélo et elle gagne toujours à tel point qu’on la surnomme ‘Terminator’”, rapporte France Bleu.

Des accusations de dopage qui ne stoppe pas sa course

Mais en 2011, la carrière de la coureuse prend un virage peu agréable. Elle est suspectée de dopage après « avoir manqué par trois fois à ses obligations de localisation dans le cadre de la lutte anti-dopage », rapporte Libération.

Elle sera finalement relaxée “de toute poursuite disciplinaire” par la Fédération française de cyclisme (FFC). “Jeannie Longo a souffert, c’est tombé à une période de sa vie où elle n’était peut-être pas à même de faire face en toute sérénité à ce genre d’accusation”, confiait Me Ravaz, l’avocat de Jeannie Longo à Libération en novembre 2011.

J’aurais préféré avoir plus de solidarité dans le milieu du cyclisme.

Sept ans plus tard, en octobre 2018, la championne cycliste est finalement revenue sur ces suspicions de dopage auprès du Parisien.

“Ça a sali ma carrière. Même si au niveau du grand public, je constate quotidiennement que cela n’a pas entaché mon image. J’aurais préféré avoir plus de solidarité dans le milieu du cyclisme. Car si on veut être objectif, on voit très bien que ma carrière est parfaitement saine et cohérente. 40 ans de carrière, ça ne s’invente pas quand même. Mes résultats parlent pour moi. Et vous voyez, je ne suis pas encore trop nulle à 60 ans”, raconte-t-elle.

Un parcours semé d’embûches sexistes

Si Jeannie Longo a marqué l’histoire du cyclisme féminin de par ses exploits sportifs, elle est surtout un modèle de femme affranchie de tous les codes sexistes et machistes. “Elle n’est pas toujours très diplomate. Elle engueulait tout le monde”, expliquait dans Le Monde l’ancien directeur technique national Lucien Bailly.

Un caractère qu’elle « s’est forgé à une époque où le cyclisme féminin est empreint de sexisme ». En octobre 2020, elle avait d’ailleurs réagi aux brimades de Marc Madiot et Laurent Fignon. 

On s’impose par ses qualités, par ce que l’on est.

« Le cyclisme est aussi un sport de femme, un sport physique et tactique, mais aussi esthétique. C’est beau une femme sur un vélo… », reprenait-elle auprès de Ouest France

Plus tard dans un rare grand entretien accordé au Télégramme, la pionnière explique que les coureuses ont été « considérées comme des concurrentes (au cyclisme masculin). À cette époque, on pouvait dire qu’une femme était moche sur un vélo. Maintenant, on n’a plus le droit de dire cela« , s’agace-t-elle, avant de nuancer : « cela dit, je n’ai jamais été, comment dire, pour l’imposition de la femme. On s’impose par ses qualités, par ce que l’on est ».

Invitée spéciale du Tour de France Femmes 2022

Restée discrète pendant de longues années Jeannie Longo était l’invitée d’honneur pour le départ du Tour de France Femmes qui s’est élancé dimanche 24 juillet 2022. 

En préambule, elle a tenu à affirmer que la Grande Boucle féminine 2022 n’était pas la première du nom et qu’elle était bien ressuscitée.

« Il faut bien le préciser car cela fait plusieurs semaines que j’entends dire que c’est le premier Tour de France féminin, et ce n’est pas très respectueux pour celles qui l’ont déjà couru (de 1984 à 1989), pour les vainqueures comme Marianne Martin (1984) Maria Canins (1985, 1986) ou moi (1987, 1988, 1989). On a marqué le cyclisme et on est un peu peinées« , a-t-elle regretté auprès du Parisien.

Nous sommes dans une société où les femmes doivent se battre. Pour être reconnues, nous devons exceller.

La coureuse s’est par ailleurs enthousiasmée qu’un tour féminin fasse son retour. « C’est dans l’air du temps. Cela va avec le mouvement de la société. Je suis un peu fière car cela veut dire qu’on avait raison et cela récompense un peu toutes mes batailles, pas seulement ma carrière« , s’est-elle félicitée. 

Mais Jeannie Longo déplore encore le regard porté sur la discipline féminine. « Nous sommes dans une société où les femmes doivent se battre. Pour être reconnues, nous devons exceller. Quand, lors d’une course, on tombe de vélo, c’est que l’on est maladroite. On ne dit jamais ça d’un homme. Le milieu du cyclisme a cherché à éteindre notre feu. Or, le spectacle féminin vaut le spectacle masculin et on commence à s’en rendre compte », a conclu la championne au micro du quotidien régional.

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