"Je n’aime pas qu’on me touche après le sexe"

Cela vous est peut-être déjà arrivé. Après un coït plus ou moins passionné couronné d’un orgasme, l’homme ou la femme dont vous criiez le nom quelques secondes plus tôt s’extrait soudainement de votre zone corporelle pour rejoindre les commodités, la douche, le frigo ou tout simplement le coté opposé du lit sur lequel vous vous trouvez.

Certains retrouvent immédiatement les bras de Morphée en ronflant et d’autres se mettent carrément à scroller leur smartphone. Vexant.

Et quand on demande aux principaux intéressés les raisons d’un tel désintérêt, les raisons se révèlent généralement diverses et variées.

Les différentes raisons des câlins post-sexe

« Je sais pas pourquoi mais après le sexe, j’ai juste envie de bouger, de faire quelque chose, d’être active !”, nous confie Hélèna*, 31 ans, pour qui l’orgasme agit comme un booster cognitif. “Je vois pas l’intérêt de rester là, à se regarder dans le blanc des yeux. »

Quant à Thomas, 34 ans, il invoque tout simplement des règles d’hygiène élémentaire. “Après le sexe, on est souvent couvert de sueur, de sperme, de sécrétions. J’ai juste envie de me rincer pour ensuite éventuellement revenir sous les draps et faire un câlin avec la personne avec qui je suis”.  On peut tout à fait, comme le suggère également  Thomas, inviter son ou sa partenaire à nous rejoindre dans la douche pour assurer cette transition sans vexation.

Si c’est juste un coup d’un soir, je trouve le fait de se câliner un peu surjoué. J’ai généralement juste envie de me rhabiller et de rentrer chez moi.

D’autres pointent une différence de comportements selon la personne avec qui ils ont eu le dit rapport sexuel, le câlinage post-coïtal étant conditionné à l’existence préalable d’une relation sentimentale entre les deux personnes concernées.

« Si c’est juste un coup d’un soir, je trouve le fait de se câliner un peu surjoué. J’ai généralement juste envie de me rhabiller et de rentrer chez moi », explique Sandra, qui avoue ne pas être tout à fait l’aise avec ces marques d’affection qu’elle juge relever de l’ordre de l’intime. “À l’inverse, avec mon ex, je pouvais juste rester des heures dans ses bras. Et je le prenais mal si c’est lui qui prenait ses distances”, nuance-t-elle.

Bref, a priori, il y aurait autant de raisons à ce refus de postliminaires qu’il y a d’être humains sexuellement actifs sur Terre. Et les explications de la science à ce phénomène sont tout aussi plurielles.

Blues post-coïtal et contre-coup hormonal

Selon une étude réalisée en 2020 par l’Institut de conseil sexuel et de sciences sexuelle de Zurich et relayé par le magazine en ligne Vice, ce phénomène serait à relier à ce que les chercheurs appellent des “symptômes post-coïtaux”, soit l’ensemble des émotions et des ressentis qui interviennent après l’orgasme sexuel, qu’il soit le fruit d’une relation sexuelle ou d’une séance perso de masturbation.

Une forme de blues post-coïtal doublé d’une baisse d’intérêt pour l’activité sexuelle qui, partagé par 94% des participants de cette étude, trouverait son origine dans des explications physiologiques.

« Certaines personnes peuvent se sentir tristes car elles ressentent une sorte de contre-coup après le pic hormonal provoqué par l’orgasme, d’autant plus quand il est intense », explique la sexologue canadienne Jessica O’Reilly sur le site Elite Daily.

« Cela peut donner le même effet que celui d’une “descente” après que vous ayez “plané », suggère-t-elle. Un basculement hormonal qui, doublé des conséquences de l’effort physique induit, peut être également à l’origine d’une grande fatigue physique et mentale qui pousse immanquablement à tomber dans un profond sommeil.

« Lorsqu’une relation sexuelle se solde par un orgasme, cela peut vraiment assommer la personne et créer une vraie envie de dormir juste après le ‘climax' », abonde également Irène Fehr, coach en sexualité.

Un éloignement socialement genré

Si nos témoins nous laissent entrevoir une certaine parité parmi les personnes concernées par ce phénomène, une idée sexiste et de surcroît hétéronormée perdure dans l’inconscient collectif : les hommes auraient plus tendance à se la jouer cavalier seule que les femmes qui, au contraire, voudraient s’accrocher au corps de leur partenaire telle une moule sur son rocher. 

En cause ? Une recherche scientifique phallocentrée, qui a longtemps justifié cette prise de distance masculine à la période réfractaire, ce délai requis par l’appareil génital masculin pour se mettre de nouveau en selle.

Or, non seulement, on a découvert depuis que le clitoris existait et qu’il pouvait être aussi sensible et intouchable que le pénis après un orgasme, mais on s’est aussi rendu compte que les préjugés sexistes socialement construits qui façonnaient nos interactions sociales, avaient également une influence sur notre manière de nous comporter sous la couette, ou du moins sur l’idée qu’on s’en fait.

Au début, tu savais pas trop quoi faire dans ces moments-là, alors tu fais comme dans les films ou les séries en pensant que c’est la bonne attitude à adopter !

« Nous endossons souvent des rôles dans la chambre à coucher, réagissant et nous comportant d’une certaine manière parce que c’est ce que nous avons l’impression que nous devrions faire, au lieu de faire ce que nous voulons vraiment faire », explique le journaliste Vincenzo Legresti dans son article sur Vice.

C’est ce qu’illustre Simon qui a peur que les postliminaires conduisent à des erreurs d’interprétation. « C’est pas que j’ai pas envie qu’on me touche, c’est que j’ai cette crainte un peu macho que la fille en face en tire des conclusions trop hâtives et se disent qu’on est en couple », confie-t-il conscient de tenir un discours pas forcément très reluisant.

À l’inverse, Hélèna et Sandra avouent s’être forcées à se montrer tactiles lors de leurs premiers ébats amoureux. « Au début, tu savais pas trop quoi faire dans ces moments-là, alors tu fais comme dans les films ou les séries en pensant que c’est la bonne attitude à adopter ! », confesse la première. “C’est seulement par la suite, quand tu commences à prendre confiance en toi, que tu te rends compte que rien ne t’oblige à faire quoique ce soit”, conclut Sandra.

De l’art de prendre congé

Problème ? Si votre partenaire de parties de jambes en l’air se révèle quant à lui aussi affectueux qu’un Saint-Bernard une fois le coït consommé, il se peut que ce.tte dernier.e se sente un brin rejeté.e et se laisse envahir par un désagréable sentiment d’insécurité si vous tendez à l’ignorer physiquement.

“Lorsque vous avez des relations sexuelles avec quelqu’un, vous vous rendez très vulnérable. C’est précisément à cause de cette vulnérabilité qu’il est important de faire attention à l’autre après un rapport sexuel », souligne sur le site Flair la sexologue Ina Van Ransbeeck, insistant sur le fait que les postliminaires restent le garant de l’intimité dans le couple, tout en venant tempérer le blues post-coïtal.

Et s’il n’est évidemment pas question de se forcer à câliner si l’on est pas d’humeur à le faire, les experts recommandent de verbaliser cette inappétence auprès de son ou sa partenaire, afin de ménager son ego et maintenir sa confiance en soi.

« C’est le seul moyen de découvrir ce dont vous avez tous les deux besoins et d’éviter les sentiments négatifs et les malentendus », conseille la thérapeute belge.

Et de pouvoir vous extirper du lit vite fait bien fait, sans culpabiliser.

*Les prénoms ont été changés sur demande des témoins.

Liens externes : https://www.vice.com/fr/article/epnyd7/pourquoi-certaines-personnes-detestent-etre-touchees-apres-le-sexe https://www.elitedaily.com/p/if-your-partner-never-wants-to-cuddle-after-sex-heres-how-to-talk-about-it-19343958 https://www.flair.be/fr/self-love/sexo/postliminaires-font-juste-apres-lamour

Source: Lire L’Article Complet