Isabelle Autissier : "Les citoyens sont de plus en plus déterminés"

Face à l’océan Atlantique, La Rochelle est le port d’attache d’Isabelle Autissier depuis quarante ans. C’est à vélo, bien sûr, que la navigatrice est arrivée au Musée maritime où elle nous avait donné rendez-vous.

Plongée dans l’écriture d’un nouveau roman et occupée à préparer sa prochaine expédition au Groenland – si la fonte accélérée des glaces ne l’empêche pas –, la présidente d’honneur de WWF France fait une pause pour alerter sur le dérèglement climatique. 

Battante et enthousiaste, cette passionnée demande à chacun·e et à la collectivité d’agir pour sauver nos sociétés.

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Marie Claire : Vous venez de passer deux mois et demi sur votre bateau, c’est un poste privilégié pour observer la détérioration de la planète.

Isabelle Autissier : Cette année, à cause du Covid, j’ai fait simple. Je me suis baladée, j’ai fait le tour de l’Islande. Le constat de l’aggravation n’est pas nouveau. Depuis vingt, trente ans, on voit que la pollution de plastiques augmente.

Mais il y a aussi tout ce que l’on ne voit pas en naviguant et qui est beaucoup plus grave : il y a des microparticules de plastique très polluantes absolument partout dans l’océan, de la surface jusqu’à 13 km de profondeur. Elles sont ingérées par tous les organismes vivants.

La hausse de la température de l’eau de quasiment 1°C ne se ressent pas non plus. Pourtant, son impact est colossal. Toutes les espèces marines sont déréglées, les chaînes alimentaires se décomposent.

Avons-nous vraiment conscience de ce qui nous attend si nous n’infléchissons pas le dérèglement climatique ?

Nous n’avons absolument pas assez d’imagination. Nous touchons là au sujet du récit, plus compliqué qu’il n’y paraît. Que signifient concrètement 2°C de plus pour la planète, la hausse de 1 mètre du niveau de la mer ?

Des lycéens m’ont demandé dernièrement à quoi ressemblerait La Rochelle dans un siècle. J’ai répondu qu’on ne pourrait plus marcher dans les rues. Y aura-t-il des passerelles aux premiers étages ou la ville aura-t-elle été évacuée ? Je ne sais pas. Mais l’eau va arriver, s’infiltrer, remonter. On ne pourra pas l’empêcher.

Tout d’un coup, grâce à un exemple, nous visualisons que notre petit confort de vie sera touché, pas seulement le Bangladesh. Mais maintenant la question est : qu’est-ce qu’on fait et comment ?

Des lycéens m’ont demandé dernièrement à quoi ressemblerait La Rochelle dans un siècle. J’ai répondu qu’on ne pourrait plus marcher dans les rues.

Vous dites qu’il faut être exemplaire individuellement.

Si tout le monde, à son niveau, fait ce qu’il peut, un gros tiers du problème est déjà réglé. Ce n’est pas rien. Moi, je mange bio et local, quasiment plus de viande, je me déplace évidemment à vélo dans La Rochelle, je m’interdis de prendre l’avion en France, je cultive un jardin partagé, j’ai isolé ma maison, je ne chauffe jamais à plus de 18 °C, etc.

Je ne prétends pas être exemplaire mais j’essaie d’être cohérente. Si nous sommes nombreux, nous envoyons un signal politique et économique qui est quand même reçu. Un Français émet 11 tonnes de CO2 par an. Il faudrait qu’il soit à 2. Mon empreinte est à 5,5 tonnes.

Je ne prétends pas être exemplaire mais j’essaie d’être cohérente.

Je peux encore gratter ici ou là mais j’arrive au bout de ce que je peux faire individuellement. Pour résoudre les 60 % restants du problème, j’ai besoin de décisions politiques, collectives et économiques.

L’intégralité de cet entretien est à retrouver dans le Marie Claire n°831, en kiosques le 9 novembre.

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