Grignotages et petites envies : « Il faut écouter nos sensations »

Loin des régimes et des diktats, Laurence Haurat, psychologue et diététicienne, nous incite à devenir un mangeur apaisé. Dans son livre, « Et si vous trouviez (enfin) votre poids idéal ? », elle nous propose d’écouter nos sensations alimentaires et de faire la paix avec nous-même. Une démarche proche du développement personnel, qui implique de laisser les idées reçues en dehors de notre assiette. À lire avec gourmandise.

ELLE. Pourquoi est-ce qu’on a tout le temps faim ?

LAURENCE HAURAT. Rappelons d’abord qu’il y a deux types de faim : la faim proprement dite, qui est un besoin physiologique, le besoin de manger pour nourrir son corps, ses tissus, ses cellules. C’est une sensation physique qui exprime une baisse de la glycémie (le taux de sucre dans le sang). Laquelle se traduit par des signaux corporels : le ventre qui gargouille, une difficulté à se concentrer, etc. Ensuite, il existe la faim émotionnelle, qui est un besoin psychologique, lié à des événements extérieurs. Cela se passe dans la tête et pas dans le corps. Il s’agit plus d’une « envie de manger » irrationnelle que d’une faim proprement dite. Elle peut surgir pour des tas de raisons. On mange pour apaiser notre stress, par habitude, par ennui, parce qu’on imite ceux qui sont autour de nous… J’ai essayé dans mon livre de réconcilier ces deux aspects, la tête et le corps. Notre société a une approche trop médicale et normative de l’alimentation, obsédée par la minceur, qui est souvent très éloignée de l’individu et de ses besoins psychiques et corporels.

ELLE. Quelle est la voie que vous préconisez ?

L.H. Il me semble important que chacun identifie ses vrais besoins. Pour ce faire, il faut déconstruire nos habitudes et écouter nos sensations. Un exercice très simple consiste ainsi à attendre d’avoir vraiment faim pour manger. Bien souvent, cette envie va surgir à des moments qui vont nous surprendre, qui ne correspondent pas aux habitudes socialement admises. En effet, nous subissons des règles, des normes, des stéréotypes qui ne répondent pas à ce que nous sommes. Par exemple, il existe des « picoreurs », qui mangent peu et souvent : les trois prises alimentaires culturellement adoptées en France ne leur suffisent pas. Si c’est votre cas, il ne faut pas hésiter à manger plus souvent par petites quantités, comme en Asie, où on se sustente neuf fois par jour. D’autres personnes, au contraire, ressentent rarement la faim, ou alors à des heures peu pratiques. Dans mon ouvrage, je propose des solutions concrètes pour pouvoir s’écouter sans se désocialiser : l’idée est d’adapter ce qu’on mange à la faim que l’on ressent, tout en tenant sa position de mangeur autour de la table. Dans tous les cas, il s’agit de savoir quel mangeur on est. Ce qui implique parfois de s’opposer à son entourage, à son éducation, aux normes sociales…

ELLE. Pourquoi les régimes sont-ils si peu efficaces ?

L.H. Il est très difficile de suivre des consignes qui ne correspondent pas à notre rythme propre. 95 % des gens qui optent pour un régime se privent, entrent dans un mode de calcul et d’anticipation qui génère de la frustration. Et cette frustration, associée à d’autres événements du quotidien stressants, finit par provoquer une désinhibition, des comportements de craquages. « J’ai craqué, je me suis lâché ! » est la phrase que j’entends le plus souvent en consultation. Un véritable cercle vicieux. Plus on se contraint, plus on craque. Cela fait cinquante ans qu’on connaît ce fonctionnement des régimes restrictifs et, pourtant, on continue à les promouvoir. Il est temps d’en sortir.

« Et si vous trouviez (enfin) votre poids idéal ? », de Laurence Haurat (éd. Eyrolles).

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