« Ginny & Georgia », série engagée ou agaçante ?
- La nouvelle série « Ginny & Georgia » conquiert le public en adoptant un ton moderne et engagé, féministe et antiraciste.
- La série manque parfois d’un peu de finesse et tombe dans un registre un peu trop bien-pensant.
- « Ginny & Georgia » fait l’objet de différentes controverses : son discours engagé n’est pas un sans-faute.
La série Ginny & Georgia est actuellement dans le
top 10 des nouveautés les plus regardées sur
Netflix France. Ce divertissement, adoptant une posture féministe, antiraciste et moderne, nous fait entrer dans un univers qui emprunte autant aux teen movies qu’aux comédies romantiques, aux drames sociaux qu’aux thrillers… Et c’est plutôt réussi. Cependant la série, accusée par certains d’être un brin donneuse de leçon sur le féminisme et l’antiracisme, suscite plusieurs polémiques…
Comme Paul Randolph (Scott Porter), le maire de Wellsbury – banlieue chic et branchée où se déroule l’intrigue – croisant Georgia (Brianne Howey) pour la première fois, nous aussi nous sommes séduits dès le premier épisode par Ginny & Georgia. Si elle flirte, aussi, avec les clichés, Georgia, loin d’être une potiche, est une jeune trentenaire indépendante, avec un solide bon sens (et de l’arnaque), ce qui la rend sympathique et drôle. Quant à son ado de 15 ans, Ginny (Antonia Gentry), elle fait forte impression dès son premier cours de littérature avec une tirade sur le manque d’autrices noires au programme. On est conquis par ce faux air d’Hermione Granger, un peu plus rock, plus intersectionnelle aussi. Même si l’on évolue dans un environnement aisé, la série étonne aussi en proposant de faire un contrepoint avec une Amérique bien moins dorée quand il s’agit de parler du passé de Georgia.
De chaque épisode une leçon tu tireras
La série aborde des questions actuelles, qu’elles soient triviales ou profondes. En bon teen show qui se respecte, on évolue au milieu des problématiques d’ados – et surtout de Ginny. Troubles alimentaires, automutilation, racisme, anxiété, sexualité, intégration au sein d’un groupe, alcool, drogues, pression scolaire… Rien n’est oublié. La vie des adultes est aussi présente, même si moins développée, pas inintéressante dans la manière d’aborder les enjeux autour de la parentalité.
Ginny & Georgia place la morale au cœur de la série, notamment avec une voix off aussi lénifiante qu’un journal secret d’ado. Evidemment, il ne s’agit pas d’une morale conservatrice mais d’une morale actuelle, qui prend donc en compte le féminisme, la cause LGBTQI + et la lutte contre le racisme. A tel point que de nombreuses spectatrices et spectateurs ont eu la sensation d’assister à une leçon de progressisme et accusent la série de performative wokeness : idée selon laquelle une œuvre s’empare de causes, les revendique haut et (trop) fort, de manière à s’auto-promouvoir. Aux Etats-Unis, les critiques de
Vulture et Variety, mais aussi une partie de
la twittosphère, ont vu dans la série un excès de zèle bien-pensant.
Le ver serait-il dans le fruit ?
Surtout, aussi engagée et militante soit la série, depuis sa sortie, elle compte déjà à son actif trois controverses qui touchent justement à ces points forts revendiqués : le féminisme et l’antiracisme.
D’abord, il y a eu la fameuse polémique provoquée par une réplique de la série. Ginny dit à sa mère, qui s’enquière de ses relations amoureuses, « Qu’est-ce que ça peut te faire ? Tu enchaînes les hommes plus vite que Taylor Swift ». Les fans comme la pop star n’ont pas tardé à réagir en accusant le
caractère sexiste de la réplique. Par ailleurs, a aussi été épinglée la scène où Ginny décide d’utiliser sa brosse à dents électrique comme un vibromasseur.
Plusieurs personnes ont souligné
l’invraisemblance de la scène, arguant que se masturber avec les poils de la brosse à dents n’était pas réaliste puisque ce procédé serait irritant, douloureux, et plein de bactéries. Second carton jaune du côté du féminisme.
Mais le bémol le plus dissonant pour cette série mettant en scène une ado noire est survenu dans l’épisode 8. Hunter (Mason Temple) et Ginny se disputent et s’accusent mutuellement d’être « trop blancs » (Hunter étant donc Américain blanc et Taïwanais ; Ginny étant métisse Américaine blanche et afro-américaine). Plusieurs internautes ont pointé un dialogue caricatural et très partiel dans sa manière d’aborder la question de la place des métis. Les tweets se sont multipliés. Debra J. Fisher et Sarah Lampert, créatrices, blanches, de la série, se sont cependant défendues en arguant que cette partie du scénario avait été écrite par Briana Belser et Mike Guayo – qui sont noirs en l’occurrence.
Malgré ces polémiques et les défauts d’une série qui joue habilement avec les attentes de ses spectatrices et spectateurs (coucou les clichés sur la Femme fatale collés à Georgia), la saison 2 est attendue de pied ferme.
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