Fatigue mentale : voici pourquoi trop réfléchir épuise notre cerveau

Il n’est plus à prouver que le travail physique épuise notre corps. Mais il est tout aussi commun de se sentir vidé.e après une longue journée de réflexion. 

Et selon une étude publiée le 11 août 2022 dans la revue Current Biology, la fatigue intellectuelle serait nocive pour notre organisme et influerait même sur nos décisions en nous poussant à faire des choix moins rationnels. Cela pourrait s’expliquer par l’accumulation de toxines au niveau du cortex préfrontal, une zone dédiée au développement des pensées, rapportent les chercheurs.

“Nos résultats montrent que le travail cognitif entraîne une véritable altération fonctionnelle – accumulation de substances nocives – donc la fatigue serait bien un signal pour nous fait arrêter de travailler mais dans un autre but : préserver l’intégrité du fonctionnement cérébral », a déclaré Mathias Pessiglione, directeur de recherches à l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) et chercheur à l’Université Pitié-Salpêtrière.

Trop réfléchir nuit à la bonne santé de notre cerveau

Si l’on ne cessait jamais de travailler, le monde tournerait-il plus rapidement ? Bien au contraire. “Il est important d’étudier les raisons de la fatigue mentale, car elle a un impact sur les décisions économiques, les traitements cliniques, la gestion du lieu de travail et l’éducation”, analyse News Medical. 

En effet, inciter à une réflexion trop intense serait bien contre-productif, arguent les chercheurs de l’étude publiée ce 11 août. « Des théories bien connues ont suggéré que la fatigue est une sorte d’illusion fabriquée par le cerveau pour nous faire arrêter ce que nous faisons et nous tourner vers une activité plus gratifiante », explique Mathias Pessiglione.

Pour en arriver à ces conclusions, les scientifiques ont réparti 40 participants dans deux groupes distincts. Tous ont effectué des tâches cognitives sur cinq séances totalisant 6,25 heures. Pour le premier groupe, ces tâches étaient volontairement plus complexes, alors qu’elles étaient plus aisées pour le second. Grâce à une technique dite de « spectroscopie par résonance magnétique », les scientifiques ont pu analyser les réactions chimiques des participants au cours de leur travail. 

Résultat : des signes de fatigue plus importants ont été signalés chez les participants ayant réfléchi plus intensément, remarquables par une “dilatation réduite des pupilles” ainsi qu’une “évolution vers des options proposant des récompenses à court terme avec peu d’effort”, mais aussi et surtout “des niveaux plus élevés de glutamate dans les synapses du cortex préfrontal du cerveau”, détaille Eurekalert.

Fatigue intellectuelle : des substances toxiques accumulées dans le cerveau

Et c’est ce glutamate qui agirait comme toxine pour le cerveau après un travail cognitif important.

Selon une étude publiée en 2010 dans la revue Medecine/Sciences, il serait “le principal neurotransmetteur excitateur du système nerveux adulte”. De nombreuses études ont d’ailleurs montré que « la cocaïne augmentait indirectement la transmission glutamatergique », relaye Maad-Digital.

C’est l’accumulation de ces excitants dans le cortex préfrontal qui aurait tendance à nous faire prendre de mauvaises décisions lorsqu’on est fatigué.

Mais est-il possible d’y remédier ? Oui, répondent les chercheurs, grâce à une bonne hygiène de vie. “Il existe de bonnes preuves que le glutamate est éliminé des synapses pendant le sommeil”, explique Mathias Pessiglione. 

Une telle découverte pourrait inciter les employeurs à aménager les programmes de travail afin d’endiguer l’épuisement professionnel des salariés. “De toute évidence, nos résultats ne sont que corrélationnels et ne peuvent être considérés comme une preuve que ce qui limite l’effort de contrôle cognitif est la nécessité d’empêcher l’accumulation de glutamate”, tempèrent toutefois les auteurs de l’étude.

Les scientifiques se disent curieux de découvrir si l’étude de ces marqueurs de fatigue dans le cerveau peuvent “prédire la guérison de problèmes de santé, comme la dépression ou le cancer”, relaye Eurekalert.

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