« Etre féministe, ça a des conséquences », confie Fanny Vedreine

  • Après la création d’un fanzine écoféministe et la publication d’un guide pratique de séduction féministe, l’autrice niçoise Fanny Vedreine sort un essai très « intime et cathartique » sur le burn-out militant.
  • A travers dix chapitres, répartis par les domaines de sa vie ruinés par le féminisme, elle donne aussi des conseils pour « avoir une note positive » dans ce constat.
  • C’est un essai destiné aux « nouvelles générations de militantes » mais aussi « aux anciennes pour qu’elles sachent qu’elles sont loin d’être seules d’être fatiguées et qu’on est toutes ensemble ».

Fanny Vedreine, 30 ans, est entrée dans le féminisme il y a huit ans, après la mort de son père, le pilier de sa famille « ultra-patriarcale ». Elle a alors ouvert les yeux et compris qu’elle évoluait dans un monde où « le sexisme était omniprésent ». Une prise de conscience « qui n’est pas sans conséquences ». Elle explique à travers son essai Comment le féminisme va ruiner ta vie (pour mieux la reconstruire, promis !) -ed. Mango, 16,95 euros- sa propre histoire pour prévenir les féministes de ce qui les attend en livrant un témoignage « intime et cathartique ».

La couverture de l'essai de Fanny Vedreine

Qu’est-ce qui a motivé l’écriture de cet essai ?

Il y a eu plusieurs choses. Le déclic, et ce qui m’a principalement inspirée, ça a été la lecture du livre de Florence Given, Women don’t owe you pretty, sorti en 2020. J’avais aussi envie d’apporter mon témoignage intime et cathartique. Le titre de mon essai est d’ailleurs complètement tiré du premier chapitre. Je me suis d’ailleurs battue pour qu’il reste tel quel. On me disait qu’on avait peur qu’il soit mal compris ou mal lu. Mais secrètement, c’est aussi mon rêve qu’une personne antiféministe l’achète en se disant « ah bah tiens ! Je le savais, j’avais raison », alors que c’est tout autre chose (rires). Et puis, j’ai aussi vu au fur et à mesure de mon militantisme, de nombreux comptes Instagram fermer à cause d’insultes et de la difficulté de gérer. Ça m’a fait réagir. Il y a aussi la possibilité de faire un burn-out quand on est militant.

En quoi ce témoignage personnel peut-il finalement concerner un grand nombre de personnes ?

Le récit de ma vie, c’est aussi celui d’autres. Quand tu deviens féministe, tu es aussi beaucoup plus empathique et sensible. J’ai commencé à lire beaucoup d’essais, écouter énormément de podcasts à ce sujet et à la fin, tu te sens mal. Mais quand je me suis intéressée au féminisme, on parlait « empouvoirement », de Beyoncé, que d’histoires géniales. On ne m’avait pas prévenue que ma vie allait être totalement bousculée, radicalement changée. Quand on s’attelle à ce sujet, on se nourrit en permanence et déconstruit jusqu’à la fin de sa vie. Et dans le fond, ça pèse. On ne m’avait pas dit non plus que, quand tu décides de l’ouvrir, de t’engager en tant que militante, ça ne rend pas forcément toujours heureux et ça a des conséquences.

Quel genre de conséquences ?

Une fois que tu as l’étiquette « féministe », elle te suit partout. Tu passes toujours pour la rageuse, celle qui a des poils sous les bras. Tu ne peux plus parler sans que la discussion finisse mal. Tu apprends alors à te taire pour faire plaisir et ne vexer personne ou à finir en larmes après un débat. C’est une étiquette difficile à porter. J’ai dû renoncer à certaines personnes de mon entourage, quitte à ne plus leur parler. Mais au bout du compte, c’est un mal pour un bien. J’ai créé autour de moi un cercle de bienveillance, même si ça n’a pas été facile.

Quel est le message à faire passer ?

L’essai explique en dix chapitres comment le féminisme a ruiné ma vie familiale, amicale, sexuelle, amoureuse, culturelle mais aussi dans mon métier et dans ma consommation. J’essaie de donner des conseils pour qu’à la fin, il y ait une note positive. Il faut apprendre à déculpabiliser, à prendre de la légèreté. Malgré tous ces effets sur ma vie, je n’ai aucun regret. Cette conscience-là, elle est partout, elle nous rend en colère en permanence. Mais il vaut mieux ça que de ne pas savoir. Devenir féministe est un acte très courageux, il faut rester forte. Ce texte est aussi une façon de prévenir les nouvelles générations de militantes tout en soutenant les anciennes qui se sentent fatiguées. Vous êtes loin d’être seules. On est toutes ensemble.

A propos de Fanny Vedreine

Fanny Vedreine a 30 ans et est originaire du Cantal. Elle a passé dix ans à Paris où elle a travaillé dans un club tout en étant pigiste. Elle part de la capitale pour Nice en 2020, où elle se consacre à l’écriture et à la vente de vins nature. Depuis, elle a créé le fanzine écoféministe Le String, dédié « à la puissance des femmes, au rock et à la sexualité » et est également l’autrice de Séduire sans soûler60 pages de conseils pratiques pour séduire dans le consentement et l’enthousiasme.

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