Des aveugles recouvrent la vue grâce à une cornée artificielle en peau de porc

Cette découverte pourrait rendre service aux plus de 12,7 millions de personnes atteintes de kératocône (maladie de la cornée, ndlr) et en attente d’une greffe, selon les chiffres d’une étude française publiée en 2016. Caractérisée par un amincissement et une déformation de la cornée, cette maladie entraîne une dégradation plus ou moins importante de la cornée, jusqu’à la cécité totale.

Dans un communiqué publié le 11 août 2022, des chercheurs l’Université de Linköping en Suède, affirment avoir conçu une cornée artificielle grâce à des cellules de porc. Leur étude pilote publiée dans Nature Biotechnology a montré des résultats positifs chez la totalité des participants. Trois d’entre eux ont même recouvré une vue complète. 

“Nous avons fait des efforts considérables pour nous assurer que notre invention serait largement disponible et abordable pour tous et pas seulement pour les riches. C’est pourquoi cette technologie pourrait être utilisée partout dans le monde”, assure Mehrdad Rafat, professeur agrégé au département de génie biomédical de LiU et fondateur et PDG de la société LinkoCare Life Sciences AB, qui fabrique les cornées issues de la bio-ingénierie utilisées dans l’étude.

Une cornée grâce à du collagène de cochon ?

La cornée correspond à la première lentille légèrement saillante de notre œil. Son rôle est de transmettre la lumière au cristallin et la rétine. Dans le cas d’un kératocône, la cornée devient conique, et la vue se dégrade. Dans le cas où le port de lentilles ne suffit pas, le seul moyen pour les malades de recouvrer la vue est de recevoir une cornée greffée d’un donneur humain. “(…) seulement un patient sur 70 reçoit une greffe de cornée”, informent les auteurs.

La cornée est composée de collagène, une protéine que l’on trouve dans la peau, les cartilages, tendons, ligaments et tissus conjonctifs. Alors, pour pallier le manque de greffons humains, les scientifiques ont cherché à savoir si l’implant de collagène animal pouvait faire effet. Du fait de son accessibilité économique et de son utilisation massive dans l’industrie agro-alimentaire, c’est le porc qui a été sélectionné. 

Sur les 20 participants à l’étude, qui vivaient en Iran et en Inde, 14 d’entre eux étaient devenus aveugles. Tous ont été greffés de molécules de collagène dérivées de peau de porc “hautement purifiées “. Non-invasive, la chirurgie n’a nécessité aucune suture : après une incision réalisée au laser, l’implant a été glissé directement dans la cornée. 

Résultat : plus aucun des participants n’était aveugle après l’implant. “L’épaisseur et la courbure de la cornée ont été restaurées à la normale”, informent les auteurs. Si bien que trois des participants ont recouvré une vision parfaite (20/20) après l’opération. À la fin du suivi de deux ans, aucune complication ni rejet n’a été signalé.

Les avantages de la cornée artificielle 

En plus d’avoir permis à la cornée des malades de se restaurer, les implants ont l’avantage de pouvoir être conservés plus longtemps que les cornées données (par des êtres humains), qui doivent obligatoirement être utilisées dans les deux semaines. 

“Les résultats montrent qu’il est possible de développer un biomatériau répondant à tous les critères pour être utilisé comme implant humain, qui peut être produit en masse et stocké jusqu’à deux ans et ainsi toucher encore plus de personnes ayant des problèmes de vision, a précisé Neil Lagali, professeur au Département des sciences biomédicales et cliniques de LiU, l’un des chercheurs à l’origine de l’étude. 

Ces résultats pourraient permettre de contourner la pénurie de tissus cornéens donnés. D’autant que, comme l’indiquent les chercheurs, la plupart des malades en attente d’une greffe vivent dans des pays en développement, dans lesquels l’accès aux traitements est “très limité”.

En 2021, un israélien de 78 ans était devenu le premier homme à retrouver la vue grâce à une greffe de cornée synthétique, imprimée en 3D.

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