Coronavirus, comment raison garder ?

La peur se propage presque plus vite que le coronavirus lui-même. Informations anxiogènes, incertitudes et effluves de gel hydroalcoolique : comment ne pas céder à la panique et rester rationnel face à l’épidémie ?

19 heures passées, Chérie FM résonne dans ma cuisine. Entre une page de pub et un tube des 10 commandements – « le dilemme », précisément -, un message signé Santé Public France et le ministère de la Santé à propos du déjà trop célèbre coronavirus déboule sur les ondes. Sans transition, de Daniel Lévi qui s’égosille aux mesures de précaution, j’ai jugé que l’heure était définitivement grave.

Et pour cause : en France, plus de 280 personnes sont infectées et 6 morts ont été confirmées. Les mesures pour contrer l’épidémie se multiplient : nous sommes au « stade 2 ». Les annulations d’événements publics s’enchaînent, le gel hydroalcoolique connaît son heure de gloire – et son inflation.

Nous vivons au rythme des informations qui tombent, des morts déplorées, des contaminés toujours plus nombreux, le virus étant en pleine diffusion. Dans les transports en commun, on toise ceux qui toussent, qui reniflent, on s’éloigne des masqués – qui pourtant se protègent. On tente de se plier aux recommandations dispensées ici et là, comme celle de se tenir à un mètre les uns des autres dans les transports, surtout s’il y a des malades dans l’assistance. Allez dire ça à l’heure de pointe. Entre 8 et 9, le métro n’en a que faire du COVID-19.

Alors, à défaut d’éviter tout être humain – et canidé – suspect, on se lave frénétiquement les mains. Et, parfois, on se demande : et si c’était moi le prochain ?

Coronavirus : panique à bord

Swann1, chef de projet dans l’industrie automobile, cède doucement à la panique. La faute au flot d’informations, mais aussi à l’entreprise. Car en plus des messages de prévention, ses collègues et lui ont été invités par leur direction à rentrer chez eux avec ordinateur portable et téléphone pro sous le bras chaque soir jusqu’à la fin du mois. Au cas où les transports seraient immobilisés. Une anticipation du stade 3 de l’épidémie qui inquiète.

En dehors de la vie de bureau, la peur s’invite dans les familles. « Mon père ne veut pas que je parte en Croatie au mois de mai », s’agace Lucile, majeure et vaccinée – mais pas contre le coronavirus, malheureusement. Pour ce papa angoissé et très prévoyant, les aéroports sont des lieux à éviter en temps de crise.

Dans les transports, Camille, 26 ans, a quant à elle créé le malaise sans le vouloir : « Je me suis mouchée dans le métro, et l’enfant en face de moi a brandi son gel hydroalcoolique », confesse-t-elle.

COVID-19, tous paranoïaques ?

Quarantaine, mort, absence de traitement ou de vaccin, explosion décomplexée du racisme anti-asiatique, économie malmenée… Les conséquences de l’épidémie en cours génèrent de l’incertitude et du stress. Celui qui nous fait craindre pour sa santé et celle de ses proches. Celui qui peut conduire à des actes insensés comme vider le rayon pâtes et conserves du supermarché le plus proche ou chaparder masque et gel hydroalcoolique dans un hôpital… Pas bien.

Sommes-nous en train de tomber dans la paranoïa ? « La peur peut entraîner de la paranoïa. Historiquement, on a été marqué par les événements comme la grippe espagnole, qui a fait des ravages. On en fait alors des généralités », constate le psychologue Sébastien Hof. « Aujourd’hui, ce qui est le plus fou, c’est que les actions qui protègent les citoyens accentuent le phénomène de peur, comme la fermeture des écoles ou des transports », ajoute le spécialiste.

Si on s’empêche de vivre, on crée notre propre mort

Côté gouvernement, on nous invite sans grande surprise à rester calme. « Il ne faut pas sombrer dans la psychose, nous connaissons les gestes barrières qui font qu’on n’est pas infecté ou qu’on réduit les potentialités d’infection », a voulu rassurer la porte-parole du gouvernement, Sibeth Ndiaye, sur France Inter. Plus facile à dire qu’à faire.

Rationaliser l’épidémie  

Au beau milieu des recommandations pour préserver notre santé physique, qu’en est-il de notre santé mentale ? Comment rester émotionnellement rationnel alors que la peur gagne du terrain ?

Cette dernière est “une émotion normale, légitime et habituelle. Il faut accepter son existence », souligne le psychologue. Il est nécessaire selon lui de prendre du recul sur soi, ainsi que sur l’actualité. « Si on s’empêche de vivre, on crée notre propre mort », analyse-t-il. C’est pourtant bien ce que l’on souhaite éviter !

« Il est évidemment nécessaire de s’informer et de mettre en oeuvre les conseils de l’OMS, sans pour autant que cela ne devienne une obsession qui nous empêche de vivre normalement », abondent Benjamin Blasco, co-fondateur de l’application de méditation Petit BamBou et la psychiatre Dr Christine Barois Bambou, dans un communiqué de presse dédié. Inutile donc d’être branché 24h sur 24 sur BFM TV.

Pour tenter de mettre de la distance avec nos émotions, « il est important de s’arrêter un moment et d’analyser le risque réel au calme, afin de prendre les mesures appropriées pour prévenir une infection potentielle, en évitant toute mesure exagérée ou erronée », rappellent-ils. 

Et quand une bouffée d’angoisse nous envahit, quelques petits exercices sont salutaires pour faire retomber la pression. 

Quels exercices pour apaiser le stress ?

  • « Revenez au présent, conseille Petit Bambou et le Dr Barois. L’anxiété c’est anticiper de manière négative quelque chose qui ne va probablement pas arriver. (…) il ne s’est encore rien passé et nous sommes embarqués dans des pensées négatives ».
  • « Observez le stress« , préconisent dans un second temps les experts. Concentrez-vous ainsi sur vos ressentis corporels et accueillez votre peur comme une amie.
  • « Prêtez attention à votre respiration. À tout moment de la journée, en particulier aux moments où vous êtes anxieux, dans les espaces publics par exemple, sentez comment le souffle traverse votre corps, de la tête aux pieds ». Cet exercice permet de se recentrer sur vous-même, sur l’ici et le maintenant.
  • « Limitez les sources d’information anxiogènes et concentrez-vous sur une activité qui requiert de l’attention. Faites une pause dans l’actualité et consacrez du temps à toute activité qui vous plaît ». 
  • Les experts conseillent également de se focaliser sur ce que l’on peut contrôler. Personne ne peut prédire l’avenir de l’épidémie mais, par contre, vous pouvez respecter les mesures qui limitent sa propagation (se laver les mains, tousser dans son coude, surveiller d’éventuels symptômes…)
  • Enfin, la pratique de la méditation est recommandée pour réduire et apprivoiser l’anxiété.

Si ces  exercices ne fonctionnent pas et que votre stress est trop important – c’est-à-dire s’il nuit à votre concentration, perturbe votre sommeil ou vos habitudes -, il est important de demander l’aide d’un professionnel.

Pour rappel, il existe des gestes simples2 pour préserver votre santé et celle de votre entourage : 

  • Se laver les mains très régulièrement.
  • Tousser ou éternuer dans son coude.
  • Saluer sans se serrer la main, éviter les embrassades
  • Utiliser des mouchoirs à usage unique.
  • Porter un masque quand on est malade (sur prescription médicale).

Sur ce, je retourne à mon tuto pour fabriquer soi-même du gel antibactérien pour les mains.

  • Malades imaginaires : 8,5 millions d’hypocondriaques et moi
  • Les vrais effets du stress sur notre corps

1Le prénom a été changé
2Source https://www.gouvernement.fr/info-coronavirus

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