Athlètes paralympiques : au-delà des prouesses
- Conquérir ou reconquérir le corps par le sport
- Une fois le handicap accepté, le potentiel se révèle
Le 28 août 2024, les Jeux Paralympiques d’été de Paris 2024 s’ouvriront en France, pour la première fois de l’Histoire.
Sous les projecteurs, des femmes et des hommes chahutés par la vie qui ont pu, ou su renverser le destin. Quand elles sont relayées par les médias, leurs prouesses sur le terrain laissent bien sûr pantois, mais elles autorisent surtout à croire que tout est possible.
Elles recadrent aussi, à leur manière, notre rapport à nos limites, à nos propres vies.
Conquérir ou reconquérir le corps par le sport
« Nous ne sommes pas des super-héros, nous sommes juste des humains », tempère Amy Purdy dans We are people, documentaire diffusé l’an dernier sur Canal +. La snowboardeuse américaine amputée des deux jambes y partage avec pudeur son malaise face aux superlatifs que suscitent les exploits en handisport. S’ils sont effectivement des athlètes comme les autres, ces sportifs de haut niveau portent en eux une lumière particulière.
D’où vient la force de transcender leurs blessures ? Quel regard portent-ils sur leur corps ? Comment arrivent-ils à de tels résultats ? « On ne sait pas toujours si c’est le handicap qui nourrit leur engagement ou si c’est le sport qui leur donne la force de surmonter la déficience. C’est parfois les deux à la fois », observe Lise Anhoury. La psychologue clinicienne à l’INSEP (Institut national du sport, de l’expertise et de la performance) travaille au long cours avec des paralympiques. D’après elle, conquérir ou reconquérir le corps et ce qu’on a été avant la maladie ou l’accident dessine un chemin de résilience inédit qui peut éveiller des ressources insoupçonnées.
Mais chaque handicap a sa particularité et chaque personne est différente. En matière d’handisport, la psychologue distingue le processus de résilience face à un handicap de naissance de celui consécutif à un traumatisme.
Et d’évoquer le judoka Helios Latchoumanaya, 22 ans, malvoyant depuis l’âge de 7 ans. « Ma rétinite pigmentaire s’est installée vers l’âge de deux ans. Je n’ai pas eu de deuil à faire sur mon handicap car je n’ai pas de souvenir d’avoir jamais été autrement. Par contre, j’aurais probablement eu besoin d’un travail d’acceptation si j’avais dû faire l’impasse sur la compétition », analyse le jeune homme.
Une fois le handicap accepté, le potentiel se révèle
Mandy François-Elie, 33 ans, a été pour sa part victime d’un accident vasculaire cérébral en 2008, à l’âge de 18 ans. Elle se réveille hémiplégique et partiellement paralysée du côté droit du corps. Avant l’accident, l’athlète prometteuse détient déjà le record de Martinique sur 400 mètres. « Une personne qui a connu un corps valide doit déjà faire le deuil de ce corps là. C’est une grande partie du travail psychologique à réaliser », indique Lise Anhoury. Le processus de reconstruction peut se heurter à des traversées du désert, voire des moments de dépression profonde, comme en témoigne la tentative de suicide de l’athlète Wojtek Czyz, amputé à l’âge de 21 ans d’une jambe, avant qu’il ne devienne champion paralympique.
Une fois la situation acceptée sur le versant psychique, leur force intérieure et leur détermination peuvent alors déplacer des montagnes.
Les profils qui pratiquaient déjà leur sport avant le trauma remettent plus facilement le pied à l’étrier et ont l’opportunité de mieux vivre le handicap.
C’est le cas de Mandy qui décide très vite de reprendre l’athlétisme du côté handisport. « Je ne parlais plus, ne marchais plus, il a fallu tout réapprendre, refaire et refaire les mêmes gestes jusqu’à ce qu’ils soient de nouveau naturels. Ça a été dur, mais voilà… « , se remémore la jeune femme au caractère de battante, comme la décrit Sylvie Talmant, sa coach et entraîneuse depuis 2012. « C’est une force de travail et le sport l’a beaucoup aidée dans la récupération de l’AVC. Les connexions neuronales se font plus facilement », constate la responsable du pôle handisport pour l’athlétisme à l’INSEP.
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