Angelo Foley : "La peur de ne pas être aimé(e) est sous-jacente à toutes les autres"

Aimer, jusqu’à l’impossible. Dans son ouvrage publié en octobre*, Angelo Foley – thérapeute holistique, conférencier et directeur artistique dans la musique – explore l’amour par le prisme des peurs qui l’entourent. Au total, celui qui a créé le compte Instagram @BalanceTaPeur en a compté et exploré 21 : de la peur de faire mal à la peur d’être seul.e en passant par celle de l’impuissance ou encore de la vulnérabilité. 

Avec recul et bienveillance, il nous aide à décortiquer la question des peurs qui empêchent d’appréhender l’amour. Celui qu’on porte aux autres autant qu’à soi. 

Vous avez créé le compte Instagram @BalanceTaPeur, qui aborde toutes les peurs. Pourquoi dans ce livre, vous êtes-vous concentré sur la question de l’amour (ou des amours) ?

Angelo Foley : Après deux ans à collecter des témoignages et à les analyser, ce qui est ressorti, c’est que les peurs étaient en général liées au fait d’être en relation. Quand je parle de relations, je parle des couples, mais aussi de la relation avec nos parents, ou de la relation à soi-même.

A chaque fois, dans les peurs confiées, le regard de l’autre était prégnant : c’est pourquoi on a orienté ce livre sur la question de l’amour, dans sa globalité. 

Vous listez 21 peurs qui empêchent d’aimer. Certaines d’entre elles sont-elles plus communes que d’autres ? 

En réalité, je dirai qu’une des peurs abordées dans l’ouvrage est sous-jacente à toutes les autres, ce qui la rend de fait plus commune, c’est la peur de ne pas être aimé.e. Dans l’ouvrage, je ne souhaitais pas la traiter à part, donc elle fait partie des 21 peurs abordées, pourtant elle est vraiment particulière car elle se cache derrière celle de ne pas être légitime, autant que celle de ne pas s’intégrer…

A chaque fois, dans les peurs confiées, le regard de l’autre était prégnant.

Encore une fois, la question du regard et du jugement de l’autre semble primordiale. 

Certaines d’entre elles concernent-elles plus les femmes ? Et si oui pourquoi ? 

C’est difficile de tirer des vérités universelles, du fait pour commencer que sur le compte Instagram, il y a seulement 13% de témoignages d’hommes et donc 87% de femmes. 

Toutefois, par rapport à ce que j’ai pu observer depuis deux ans, certaines peurs semblent être plus présentes chez les femmes. Celle de ne pas être légitime par exemple : c’est une peur qui découle d’une certaine manière des injonctions sociétales et du patriarcat. Toujours d’après ce que j’ai pu observer, les hommes ont moins cette peur de prendre leur place, puisque la société les y “autorise” même si d’ailleurs, c’est au détriment de quelqu’un d’autre. En résumé, le patriarcat dans notre société pousse les hommes à prendre leur place et les femmes à faire leurs preuves pour la gagner. 

Certaines peurs semblent être plus présentes chez les femmes. Celle de ne pas être légitime par exemple : c’est une peur qui découle d’une certaine manière des injonctions sociétales et du patriarcat.

L’autre peur identifiée est liée à la charge mentale : certaines femmes en effet vont vivre avec la peur de ne pas en faire assez et vont continuellement chercher à cocher le plus de cases possibles pour exister. Voilà selon moi, les deux angles potentiellement genrables, mais encore une fois, on ne peut pas tirer de conclusions universelles. 

https://www.instagram.com/p/CGFqc7LAKHP/

Comment expliquer cette proportion d’hommes et de femmes sur @BalanceTaPeur ?

C’est difficile à dire. On pourrait penser que cela est intrinsèquement lié au fait que les hommes ont plus de mal à dévoiler leurs émotions et qu’il n’est pas bon dans une société patriarcale de se montrer vulnérable. Et c’est vrai par ailleurs. Mais le ratio en tant que tel ne peut pas être expliqué uniquement par ce prisme : des comptes Instagram dédiés aux émotions masculines existent et ont donc de fait 100% d’hommes. Peut-être est-ce lié à moi, à ma façon d’aborder ces questions…

Y a-t-il des peurs qui empêchent de s’aimer soi ? D’ailleurs, n’est-ce pas par là qu’il faut commencer avant de chercher à aimer l’autre ?

C’est une drôle d’injonction que de penser qu’il faut s’aimer soi avant d’aimer un.e autre. À moins d’être né.e seul.e sur une île déserte, c’est vraiment cocasse de penser que l’on peut se passer du regard de l’autre. Il est fondamental ce regard pour l’être humain. Et c’est d’ailleurs grâce à la multiplication de ces regards que l’on apprend à s’individuer et à se différencier. À travers le regard de l’autre et en présence de l’autre, le soi s’ajuste, se crée, s’adapte en continu. 

Et pour répondre plus précisément à la question, toutes les peurs empêchent finalement d’aimer ou de s’aimer. Et il n’y a pas de chronologie ou de stratégie juste pour cela. On conseille souvent à une personne qui vit une déception amoureuse de prendre du temps pour elle, seule, avant de se lancer dans une autre histoire. Mais parfois, le regard d’une nouvelle personne sur soi va permettre de se reconstruire et d’avancer. 

À travers le regard de l’autre et en présence de l’autre, le soi s’ajuste, se crée, s’adapte en continu. 

Chaque chapitre est illustré d’un message reçu sur Instagram : les réseaux sociaux permettent-ils une plus grande transparence émotionnelle ?

Je pense, par rapport à mon expérience, que l’anonymat peut effectivement être un facteur pour se livrer plus facilement. Parfois, le simple fait de livrer son récit apaise, d’autres fois certains sollicitent l’aide de la communauté. Je ne sais pas si les réseaux sociaux favorisent ces échanges et ces témoignages, mais disons que pour la génération née avec Internet et les smartphones, c’est sans doute un biais “naturel”. 

Par contre, les personnes choisissent ce qu’elles écrivent et ce qu’elles envoient : en cela, on ne peut pas parler réellement de transparence émotionnelle. Disons que c’est finalement plus une question d’habitude : quand on est à l’aise sur les réseaux sociaux au quotidien, on aura tendance à se tourner vers eux, aussi pour partager ses émotions. 

Et puis après deux ans, on s’aperçoit quand même des limites de ces plateformes virtuelles. Ils ne remplaceront jamais une expérience profonde (voyage, thérapie, relations) dans l’expression des émotions. 

Dans la dernière partie du livre, vous évoquez les sites et applis de rencontres, les love coach et aussi les raisons des divorces…  En quoi l’amour est aujourd’hui un enjeu de société ?

Je crois que ça l’a toujours été, depuis que l’homme se pose la question de l’amour, avec un grand A. On a l’impression que ça émerge plus aujourd’hui, à cause des médias et des différents outils qui permettent la diffusion. Avant on avait les échanges épistolaires, aujourd’hui on a Amours Solitaires : ce qui change radicalement, c’est l’aspect public. 

Mais je ne pense pas qu’on puisse dire que c’est plus important aujourd’hui. De tous temps, les hommes cherchent à résoudre les questions existentielles, de manière impuissante et obsolète, et l’amour en fait partie. Tous les outils cités tentent de retirer le mystère, mais si l’amour intéresse tant, c’est parce que c’est magique. 

Quel est le point de départ pour se libérer de ses différentes peurs ?  

Pour se libérer de ses peurs, il faut pouvoir les identifier d’abord et surtout les exprimer. Par exemple, dans un conflit de couple, au lieu de faire perdurer les disputes, si l’un.e des partenaire montre sa vulnérabilité en expliquant qu’il ou elle a peur que l’autre le ou la quitte, ne l’aime plus, etc, ça désamorce tout de suite la situation.

Il n’y a pas de débat dans la peur ! Et puis le fait de pouvoir la verbaliser, et bien, ça soulage. 

  • Acheter « 21 peurs qui empêchent d’aimer » d’Angelo Foley, (Ed. Albin Michel) sur PlaceDesLibraires
  • Acheter « 21 peurs qui empêchent d’aimer » d’Angelo Foley, (Ed. Albin Michel) sur Amazon

Source: Lire L’Article Complet