À quoi va ressembler le règne de Charles III ?

Jamais héritier du trône britannique n’avait patienté si longtemps. Sa place lui était réservée depuis sa naissance, en 1948. Le 8 septembre 2022, à la disparition de sa mère, le prince Charles est automatiquement devenu le roi Charles III.

La monarque et sa fonction avaient fini par se confondre, tant elle incarnait la Couronne depuis sept décennies. Tant elle était populaire aussi. Un récent sondage, réalisé par l’institut Ipsos en mars 2022, révélait qu’Elizabeth II demeurait la personnalité de la famille royale la plus appréciée des Britanniques, avec 69% d’opinions favorables. 

Dans cette même enquête parue une demi-année avant que son fils de 73 ans lui succède, 42% des Britanniques confiaient souhaiter que ce dernier laisse sa place au prince William, deuxième dans l’ordre de succession. Seuls 24% des Britanniques voulaient, à l’inverse, que Charles devienne roi. Alors, comment assurer cette succession ? Se l’approprier, la réinventer ? Être audible aussi, dans ce contexte critique pour le Royaume-Uni, touché par une sévère crise économique ?

Charles III, un roi économe et moins protocolaire

Il donnait le ton dès novembre 2018. « Le rôle de monarque et celui de prince de Galles sont totalement différents. Je ne serai pas un roi intrusif. Je ne suis pas aussi stupide », prévenait le père de Harry et William, lors d’une interview accordée cette année-là à la BBC

Puis, dès sa première allocution en tant que roi, Charles a évoqué « une période de changement pour sa famille ».

Des ruptures annoncées clairement et directement, décryptées par l’expert des têtes couronnées Stéphane Bern, au micro d’Europe 1. « Il va réduire la monarchie à sa plus simple expression, formule le présentateur de Secrets d’Histoire. Il a prévenu que ses frères n’auraient plus aucun rôle. Il a prévenu que la monarchie, ce sera Charles, Camilla, WilliamKate et les trois petits [le prince George, la princesse Charlotte, et le prince Louis, ndlr]. Et que les branches collatérales devraient travailler, arrêter de vivre dans les palais, qu’il n’y aurait plus de garde du corps, de police, que chacun doit se débrouiller. »

Charles souhaite depuis très longtemps réduire les effectifs de la monarchie pour réduire les coûts.

« Charles souhaite depuis très longtemps réduire les effectifs de la monarchie pour réduire les coûts », assurait en ce sens la journaliste anglaise et spécialiste de la famille royale Angela Levin dans TalkRadio, au printemps 2021. Car les dépenses de « la Firme » sont alimentées par l’argent du contribuable et exaspèrent souvent le peuple britannique, bien qu’attaché à la monarchie.

Cette sobriété comme nouvelle ligne de conduite s’illustrera le 6 mai 2023, lors de son couronnement, pense Stéphane Bern : « Ce sera certainement un roi de transition, son couronnement sera beaucoup plus simple et il n’y aura pas le faste du couronnement de la reine en 1953 ».

Mais avant ce rendez-vous historique, les premiers changements s’organisent déjà. En quittant leur résidence officielle de Clarence House pour Buckingham, Charles III et Camila ont laissé derrière eux plusieurs membres de leur personnel. Si certains d’entre eux pensaient fusionner avec les équipes du Palais, le roi a avisé plusieurs dizaines d’employés d’une vague de licenciement, révélait The Guardian, le 13 septembre 2022.

Le nouveau roi a aussi mis en vente quatorze chevaux qui ont appartenu à Elizabeth II, a annoncé la maison de vente aux enchères Tattersalls, à la BBC, le 24 octobre dernier. La défunte reine possédait près de 180 équidés de course, en vendait en moyenne 7 par an.

  • Les princes Harry et Andrew bientôt écartés pour de bon des affaires de Charles III
  • Tous ces caprices que Charles III ne peut plus se permettre maintenant qu’il est roi

Un règne moins coûteux, mais aussi moins protocolaire. Selon les informations du média d’outre-Manche The Mirror, partagées le 21 septembre dernier, la nouvelle reine consort ne nommera pas plusieurs dames de compagnie pour l’assister personnellement, comme l’a fait la reine Elizabeth II dès le début de ses fonctions ou d’autres monarques avant elle.

Celle qui a épousé le nouveau roi Charles III en 2005 entend rompre avec cette tradition. « Elle assure qu’elle n’a pas besoin » de la présence de dames de compagnie, rapportent au tabloïd plusieurs sources proches de la monarchie.

Un règne engagé en faveur de l’écologie ?

Si Elizabeth II n’avait que 25 ans lorsqu’elle a hérité de la Couronne de son père disparu, Charles accède tard au trône, avec certains engagements muris et défendus depuis plusieurs décennies. Depuis les années 80, par exemple, le fils aîné du prince Philip plaide l’agriculture biologique, s’intéresse à l’architecture, alerte sur le réchauffement climatique et la déforestation.

« Je sais que beaucoup de vos pays ressentent déjà l’impact dévastateur du changement climatique. Je ne peux donc que vous exhorter, en tant que décideurs du monde, de trouver un moyen de surmonter nos différences afin que nous puissions tous nous mettre au travail ensemble pour sauver cette précieuse planète et sauver l’avenir menacé de nos enfants », déclarait-il en novembre 2021 devant une centaine de chefs d’État à la COP-26, à Glasgow, en Écosse.

Quarante ans auparavant, en 1980, Charles acquiert en tant que duc de Cornouailles une demeure dans le Gloucestershire, dans le sud-ouest de l’Angleterre. Trois jardins y sont entretenus de manière organique, des panneaux solaires, installés, et l’eau, filtrée par un système d’égoût naturel. La presse anglaise se moque de celui qu’elle surnomme alors « le prince des papates ». Cinq ans plus tard, une ferme biologique est créée sur ce même domaine.

Highgrove incarnait tout son engagement écologique précurseur. Et dès 2010, Charles confiait à la BBC qu’il serait « terriblement triste » de se séparer de lieu qui appartient au duché de Cournouailles lorsqu’il deviendra roi. « Tout ce que j’ai fait ici… C’est presque mon enfant. Chaque arbre, tout ici a une signification et porte la marque de l’endroit ».

L’époux de Camilla a également travaillé sur sa propre marque de produits bio, « Waitrose Duchy Organic », et lancé un projet d’éco-village, pensé pour les piétons et non pour les voitures.

Une question désormais : le prince écolo deviendra-t-il un roi engagé ? Le monarque milliardaire adoptera-t-il son règne à ses engagements ? Sa voix sur le climat portera-t-elle à l’échelle des dirigeants mondiaux ? Saura-t-il dépasser sa fonction symbolique de roi pour agir ?

Le règne du pardon ?

Le nouveau roi Charles III a hérité de la Couronne britannique, aussi de 14 royaumes dits du Commonwealth, issu d’un passé de domination sanglante.

Le règne d’Elizabeth II ayant été très cérémonieux, et non pas exécutif, cette dernière avait été peu tenue pour responsable des choix politiques des dirigeants du pays. Une aura dont ne bénéficiera pas son fils. Restitution des richesses volées, indemnisations financières et excuses publiques : le règne de Charles III sera-t-il celui du pardon et de la réparation ?

Source: Lire L’Article Complet